Claudette Lévesque (RCIP) : «Nous souhaitons encourager la coopération entre les musées de France et du Canada, en matière de numérique»

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Il y a quelques mois déjà, le Clic France a entamé des discussions avec un organisme gouvernemental du Canada œuvrant dans le monde muséal canadien, le Réseau canadien d’information sur le patrimoine (RCIP). Nous sommes heureux de vous informer que nous avons conclu un premier accord de collaboration afin de promouvoir nos contenus respectifs par l’entremise de nos bulletins mensuels et des médias sociaux.

Nous avons demandé à Madame Claudette Lévesque, directrice générale par intérim, de nous présenter son organisme, et les divers produits et services offerts aux musées et institutions culturelles canadiennes.

Pouvez-vous nous parler de votre rôle au sein du RCIP?

J’ai joint l’équipe du RCIP il y a maintenant un peu plus d’un an. En tant que directrice générale par intérim, j’assume la saine gestion et détermine les priorités stratégiques de l’organisme. Le RCIP agit en tant que centre national d’expertise, au sein du ministère du Patrimoine canadien, auprès de 1500 musées et autres établissements patrimoniaux membres de partout au Canada, en leur permettant de réseauter entre eux et avec leurs publics grâce aux technologies numériques. Toutefois, ce qui me passionne, c’est de guider une merveilleuse équipe multidisciplinaire qui élabore et offre des produits et services favorisant la création, la gestion, la présentation et la préservation du contenu numérique patrimonial canadien. Le RCIP compte une soixantaine d’employé(e)s, dont des experts en muséologie et en sciences de l’information, des spécialistes en informatique, en formation, en marketing et en gestion de programmes.

Pouvez-vous nous dire quand le RCIP a été créé et pourquoi?

En fait, tout a commencé en 1972. Le RCIP a d’abord été créé pour élaborer un inventaire national des objets de musées scientifiques et culturels conservés par les institutions publiques du Canada. Dans les années 1980, le RCIP a commencé à offrir de la formation professionnelle à ses membres. Par la suite, dans les années 1990, il a facilité l’accès Internet à des ressources professionnelles, puis lancé, en 2001, le portail Musée virtuel du Canada (MVC) et les programmes qui offrent du financement aux musées pour la création de contenu numérique.

Quelles sont aujourd’hui les activités principales du RCIP?

Le RCIP appuie l’élaboration et la présentation de contenu patrimonial numérique avec ses programmes d’investissement et gère son portail museevirtuel.ca qui présente l’histoire, le patrimoine et la culture du Canada. Nous sommes fiers de créer un espace mettant en vedette près de 700 expositions virtuelles, près d’un million d’images et une mine de contenus multimédias captivants. Nous mettons à la disposition du monde l’univers des arts, des sciences et de l’histoire raconté par les musées canadiens.

Le RCIP offre également des ressources pour le perfectionnement des compétences des professionnels du patrimoine par l’entremise de son site Échange professionnel. Il effectue régulièrement des analyses de l’environnement qui l’aident à définir ses projets de recherche. À titre d’exemple : le domaine de la préservation numérique dans les musées. Tous les résultats de ses recherches sont communiqués dans le site Échange professionnel.

Si un établissement patrimonial canadien veut devenir membre du RCIP, celui-ci peut le faire tout à fait gratuitement en se rendant dans la section Adhésion du site Web.

Pouvez-vous nous donner un exemple de recherche récente qui touche les innovations technologiques des musées canadiens?

Aujourd’hui, de plus en plus de personnes accèdent à des contenus sur des appareils mobiles et cela a un grand impact sur les musées. Les possibilités offertes par les technologies, telles que la réalité augmentée, les services géolocalisés et la communication en champ proche, représentent autant de défis pour les organismes que d’attentes auprès des visiteurs. En effet, ces derniers s’attendent à ce que l’accès à l’information soit sans faille et rapide n’importe où, à n’importe quel moment. Les musées doivent donc continuellement innover et créer des contenus numériques sur de multiples plateformes afin d’être à la fine pointe et d’attirer un plus grand nombre de visiteurs.

Pour diriger ses membres, offrir des conseils basés sur de l’expérience concrète ainsi que des leçons apprises et des meilleures pratiques, le RCIP a entrepris un projet d’élaboration de deux différentes applications mobiles. La première est une « Web app » ou site Web mobile basée sur la géolocalisation, en partenariat avec la Surrey Art Gallery de la Colombie-Britannique. La deuxième est une application dite « native », qui propose une expérience en réalité augmentée. Celle-ci met en valeur le contenu historique du Vieux Port de Montréal, au Québec. Elle sera bientôt disponible dans les boutiques Apple et Android.

Au début de 2013, un rapport de projet s’attardant sur les techniques de la géolocalisation et de la réalité augmentée ainsi que sur les différences, les avantages et les lacunes liées au développement d’applications natives et de sites Web mobiles sera partagé avec les musées canadiens.

Que contient exactement le site Échange professionnel?

Échange professionnel est une ressource fiable pour les professionnels des musées et du patrimoine sur l’utilisation des technologies numériques. Ce site leur permet de rester au fait des meilleures pratiques, comme la gestion des collections, la gestion de la propriété intellectuelle et la préservation numérique. Il leur offre également des outils de référence dans divers formats (guides, fiches d’information, cours en ligne) et plusieurs bases de données essentielles à leur travail.

Qu’est-ce que le portail du Musée virtuel du Canada (MVC)?

Le portail museevirtuel.ca, produit et géré par le RCIP, est une initiative qui présente l’histoire, le patrimoine et la culture du Canada à des publics nationaux et internationaux au moyen d’expositions en ligne et d’autres ressources numériques développées par les musées et institutions membres du RCIP. À ce jour, nous retrouvons près de 700 expositions virtuelles. Le Musée virtuel présente également le Centre des enseignants qui regroupe des ressources éducatives numériques riches, fiables, bilingues et libres de tous droits d’utilisation, dédiées aux éducateurs ainsi qu’aux élèves de 6 à 16 ans.

Au début de cet entretien, vous avez mentionné les programmes d’investissement. Pouvez-vous nous en dire plus?

Certainement. Le RCIP gère deux programmes d’investissement qui permettent aux établissements membres d’élaborer du contenu pour le Musée virtuel du Canada. Le budget annuel des investissements est d’environ 2,2 millions de dollars canadiens (1.7 million d’euros).

. Le volet Expositions virtuelles est consacré aux plus grands musées et à des productions en ligne novatrices et bilingues (investissement moyen de 200 000 $CAN, environ 157 000 euros).

. Le volet Histoires de chez nous permet aux petits musées comptant au plus cinq employés à temps plein, de produire des expositions en ligne qui explorent l’histoire locale de leur collectivité (5000 $CAN par production; 2 500 $CAN pour les productions subséquentes). C’est un bien petit investissement, mais qui permet de conserver et de diffuser des histoires locales qui, sans quoi, seraient oubliées.

Par l’entremise d’appels de propositions, le RCIP et ses membres élaborent en moyenne chaque année environ 10 nouvelles expositions virtuelles et 30 expositions Histoires de chez nous.

Est-ce que vous offrez de la formation à vos membres?

Nous favorisons toujours l’apprentissage des professionnels du patrimoine autant en personne qu’en ligne.

En personne, le RCIP offre de la formation aux professionnels chevronnés ou débutants de partout au Canada. Les sujets varient : normes de documentation, gestion des collections, Web et technologie. Bon nombre de séances et d’ateliers du RCIP sont présentés conjointement avec des partenaires provinciaux ou territoriaux et des établissements d’enseignement postsecondaire.

. Le site Échange professionnel du RCIP, à l’intention des professionnels et des bénévoles, offre des ressources en ligne pour le perfectionnement des compétences qui sont en lien avec les activités de recherche du RCIP. Ces ressources incluent surtout des rapports et articles, des cours, des entrevues, des répertoires, des bibliographies et des bases de données (p. ex., la base de données bibliographiques du Réseau d’information sur la conservation – BCIN).

Est-ce possible pour un organisme international d’obtenir de la formation de la part du RCIP? 

Bien sûr. D’ailleurs depuis 2005, des professionnels du RCIP rencontrent des étudiants de l’École du Louvre sur une base annuelle. Il existe un programme d’échange entre l’École du Louvre et le programme de maîtrise en muséologie de l’Université de Montréal, permettant chaque année à des étudiants de l’Université de Montréal et de l’Université du Québec à Montréal de séjourner à l’École pendant deux semaines afin d’aborder la « muséologie française ». En retour, l’Université de Montréal reçoit, de juillet à septembre, un groupe d’étudiants de l’École du Louvre pour un séminaire d’insertion professionnelle dans les musées québécois, afin de les initier aux méthodes nord-américaines. Lors de nos rencontres annuelles, le RCIP peut faire connaître aux étudiants français le mandat et le rôle particulier du RCIP auprès de la communauté muséale canadienne, les renseigner sur les projets de recherche en cours ainsi que sur le Musée virtuel du Canada.

Le RCIP participe également aux travaux d’un comité nord-américain responsable de maintenir un outil de classification et de normalisation terminologique (en anglais seulement) pour les collections historiques/ethnologiques : Nomenclature 3.0. Nous avons aussi déjà offert un atelier à Londres sur le marketing et les moteurs de recherche, et sommes actifs auprès de certains organismes américains, tels le Museum Computer Network et le Museums and the Web.

Qu’est-ce que Artefacts Canada? 

Artefacts Canada est un répertoire national qui contient près de 4 millions d’enregistrements d’objets et 900 000 images provenant des collections de centaines de musées de partout au Canada.

Vous pouvez y trouver des renseignements sur des disciplines comme l’archéologie, les arts décoratifs, les beaux-arts, l’ethnologie et l’histoire. L’inventaire comprend aussi des contributions régulières de plus de 460 établissements patrimoniaux et ce nombre ne cesse de croître. Artefacts Canada est un élément important de la réponse du Canada à la Convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels, établie par l’UNESCO en 1970. Artefacts Canada est présentement en cure de rajeunissement et nous travaillons très fort à la modernisation de son interface.

Les musées canadiens et français peuvent-ils apprendre de leurs expériences numériques respectives? Comment pourrait-on développer une coopération entre nos deux pays dans ce domaine?

Les musées de France et du Canada, et leurs professionnels, peuvent apprendre beaucoup de leurs expériences respectives dans ce nouveau domaine  qu’est le numérique muséal. Nous pouvons échanger nos bonnes pratiques et leçons apprises et peut-être même développer des projets en commun.

C’est pourquoi nous souhaitons encourager les relations et la coopération entre les musées français et canadiens en matière de numérique et de nouvelles technologies. Nous sommes fiers de cette première collaboration entre le RCIP et le Clic France.

Cela va nous permettre de promouvoir des contenus et des articles qui sauront intéresser les institutions culturelles de nos deux pays et encourager nos membres à s’inscrire à nos bulletins électroniques respectifs pour en connaître davantage sur les réalisations et les projets des musées des deux pays.

Entretien réalisé par mail du 15 au 25 novembre 2012

Quelques projets innovants soutenus par le RCIP et récompensés

De nombreuses productions et expositions de museevirtuel.ca ont remporté des prix au fil des ans. En voici quelques exemples récents dont nous sommes très fiers :

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