Près de 400 ans après la mort de Shakespeare, l’Université du Texas à Austin vient de mettre en ligne une re-création numérique de la galerie ouverte en 1789 par John Boydell, en l’honneur du poète britannique. Ce musée virtuel s’inspire de la visite du musée par Jane Austen, en 1796 et reconstitue ce qui fut sans doute l’un des premiers musées du monde.
La Galerie Shakespeare, imaginée et financée par John Boydell, était installée sur une artère commerciale de Londres, au 52 Pall Mall. Constituée de 3 chambres, la galerie peut aujour’hui être considérée comme l’ancêtre du musée moderne. A son ouverture, la Galerie proposait 34 peintures mais le chiffre a atteint 167 à 170 lors de sa fermeture. Chacune des peintures, accrochées sur les murs des chambres, représentait une scène différente d’une pièce de Shakespeare.
Le musée avait même installé un atelier sur son niveau inférieur pour produire et vendre des gravures de souvenirs. JohnBoydell peut ainsi être considéré comme l’inventeur du concept de la boutique de musée.
En son temps, ce musée a fait sensation, attirant des foules de visiteurs venus s’immerger dans l’espace et s’émouvoir devant des peintures grand format représentant des scènes des tragédies, des comédies et des pièces historiques de Shakespeare, commandées aux plus grands peintres de la Grande-Bretagne et accrochées côte à côte sur des murs bleus clairs.
Le musée a fermé en 1805, suite à la faillitte de son concepteur qui y avait investi 150 000 £ de l’époque. Sa collection de peintures a été dispersée à travers une vente aux enchères en 1805, destinée à combler les dettes. Et l’immeuble a été démoli en 1870.
Une visite virtuelle fait revivre la Galerie, 226 ans après son ouverture
2016 est une année majeure pour Shakespeare car elle célèbre le 400e anniversaire de sa mort. A cette occasion, l’Université du Texas (UT) à Austin a décidé de recréer de manière numérique la galerie, en s’inspirant des souvenirs de l’auteur Jane Austen, lors de sa visite en 1796.
Cette visite virtuelle a été mise en ligne le mercredi 16 décembre 2015.
Comme l’explique Jennifer Schuessler dans le New York Times, la galerie était non seulement importante pour Shakespeare, mais surtout pour l’histoire des musées, marquant “un moment crucial dans la naissance de la culture du musée moderne, avec son appel démocratiques à la classe moyenne, affamée de culture”. Cette aspect de la galerie est d’ailleurs l’objet d’un livre publié récemment, Exposer Englishness, par l’historien d’art américain Rosie Dias qui explique “aujourd’hui, les musées peuvent vivre ou mourir par leur capacité à faire participer le public. Une préoccupation que vous pouvez vraiment faire remonter à Boydell”.
Le Professeur Janine Barchas du Département de Langue Anglaise de l’UT a dirigé le projet “ce que Jane a vu” en collaboration avec les étudiants et le personnel d’un laboratoire de développement technologique de l’université. La reconstitution numérique de la Galerie Shakespeare s’est appuyée sur l’analyse de nombreux documents historiques, gravures, peintures, factures de Boydell. L’équipe a également pu réutiliser des éléments rassemblés dans un projet prédécent qui portait sur une exposition de 1813 des peintures de Joshua Reynolds, également organisée au 52 Pall Mall, suite à la fermeture de la Galerie Shakespeare, et visitée par la même Jane Austen.
Dans la reconstitution de 2015, les visiteurs en ligne peuvent se promener à travers les trois chambres qui étaient à l’origine reliées par un escalier central, en cliquant à travers un plan d’étage interactif. Ils peuvent ensuite sélectionner les oeuvres d’art de Reynolds, Henry Fuseli, Benjamin West, et d’autres peintres britanniques, et lire des textes d’accompagnement sur leur correspondance avec l’oeuvre et les scènes de Shakespeare.
Cette initiative originale de l’Université du Texas permet donc de revivre l’expérience de visite de ce musée créé en 1789 mais également de comprendre la naissance du concept même de musée. Passionnant !
SOURCES: Université du Texas, hyperallergic.com, star-telegram.com
Date de première publication: 20/12/2015
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