Un jardin, des archives numérisées en attendant un musée … Paris et la France se souviennent des attentats de novembre 2015

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10 ans après les attentats terroristes de janvier et novembre 2015, les parisiens et les français se souviennent. Les souvenirs populaires se patrimonialisent par la numérisation, un parking devient un jardin mémorial, plusieurs expositions sont preoposées et le futur musée du terrorisme trouve enfin un lieu d’implantation à Paris, pour une ouverture en 2030.

  • Numérisation des souvenir populaires

Les Archives de Paris ont entrepris et mené le précieux travail de conservation des hommages aux victimes du 13 novembre 2025.

7 689, c’est le nombre bougies, objets (guitares, ours en peluche…), dessins, surtout d’enfants, mots, lettres, poèmes, origamis et autres hommages déposés spontanément devant les lieux des attentats du 13 novembre 2015, Bataclan, Bonne Bière, Casa Nostra, Comptoir Voltaire, Belle Équipe, Petit Cambodge et Carillon.

Ces témoignages de soutien ont été récoltés par les Archives de Paris dès décembre 2015. Un minutieux travail a ensuite été entrepris pour conserver tous ces documents et les numériser.

Conservation de « souvenirs » de novembre 2015. Archives de Paris Henri Carat / Mairie de Paris

Les Archives de Paris ont été naturellement chargées de collecter, nettoyer et classer tous ces documents afin de préserver les témoignages de cet élan de solidarité.

La première étape fut donc tout d’abord d’immortaliser ces mémoriaux en les photographiant. Puis, progressivement, d’ôter respectueusement les objets, textes et dessins déposés.

Si les Archives de Paris se chargent des textes et dessins, les objets proprement dits, tels que les nombreuses guitares, ont été pris en charge par le musée Carnavalet.

Les prélèvements de tous ces témoignages se sont fait en 17 étapes successives, de décembre 2015 jusqu’à l’été 2016.

Après traitement, les archivistes de Paris ont classé et numéroté ces milliers de pièces par date et lieu de collecte. Grâce au mécénat proposé spontanément par la société ARKHÊNUM, leur numérisation a ensuite été effectuée. La dernière étape des métadonnées (légendes et descriptions précises) et de l’indexation définitive au sein des Archives de Paris nécessitera encore de nombreux mois de travail.

Du 8 au 16 novembre 2025, les Parisiens sont à nouveau invités à venir déposer une bougie, une fleur ou un mot aux pieds de la statue de la République en hommage aux victimes, aux rescapés, à leurs familles. Les nouveaux messages seront collectés par les Archives de Paris.

L’ensemble des documents numérisés seront progressivement mis en ligne sur le site des Archives de Paris. Cette numérisation fait également l’objet d’une exposition (voir ci-dessous).

  • Un parking devient jardin mausolée

À l’occasion de la cérémonie du 10e anniversaire des attentats du 13 Novembre, le chef de l’État et la maire de Paris inaugurent le jeudi 13 novembre un jardin mémoriel, au cœur de Paris, imaginé pour rendre hommage aux 132 victimes.

Les Parisiens et les touristes avaient déjà accès au jardin du Souvenir depuis le 20 juin 2025, après neuf mois de travaux.

Autrefois un parking, ce lieu transformé en site de recueillement se situe en face de l’Hôtel de Ville, place Saint-Gervais (4e arrondissement), un emplacement «neutre», loin des six lieux meurtris.

Le jardin est constitué d’un parterre de pavés et de végétation surplombé de stèles de granit et entouré d’arbres feuillus. Le projet a été méné par l’entreprise Wagon Landscaping, en concertation avec la mairie de Paris et les associations de victimes.

L’aménagement du jardin a été imaginé à partir de la géographie des huit lieux des attaques : le Stade de France, Le Carillon, Le Petit Cambodge, La Bonne Bière, Le Casa Nostra, La Belle équipe, Le Comptoir Voltaire et le Bataclan. Chaque pâté de maisons est représenté par de la végétation (des graminées et des vivaces qui fleurissent) et est séparé par des allées pavées.

«L’idée maîtresse n’était pas de reproduire une maquette des sites mais d’en réaliser une interprétation. Chaque espèce de plante a minutieusement été choisie pour apporter un paysage fleuri le plus longtemps dans l’année», a expliqué au Figaro Mathieu Gontier, paysagiste, concepteur et maître d’œuvre du projet chez Wagon Landscaping.

Des blocs de granit, visibles au premier regard grâce à leur hauteur, ont été disposés aux quatre coins du jardin. Sur les côtés de ces stèles, ont été gravés les noms des lieux des attaques ainsi que ceux des 132 victimes. Et devant chaque stèle se trouve un banc, permettant aux visiteurs de se recueillir.

Deux arbres encadrent le jardin. L’orme de la justice, côté est en face de l’entrée de l’église, âgé de 100 ans. Et l’olivier de la paix planté dans un bloc de granit, qui avait été offert par la ville de Paris aux associations de victimes, cinq ans après les attentats.

Mathieu Gontier explique par ailleurs que le projet vise à donner une place aux oiseaux, «un animal qui représente l’âme des personnes disparues»«Pour qu’ils viennent, nous avons installé des arbustes à baies, des nichoirs et créé des bains d’oiseaux, creusés sur le dessus rocheux des stèles», explique le concepteur du lieu.

  • Des expositions
Dans le cadre des commémorations des 10 ans des attentats du 13 novembre 2015, trois expositions sont présentées dans l’espace public.
. « Paris, le 13 novembre 2015. Du jour au lendemain… », par l’association 13onze15 Fraternité et Vérité, sur les façades de la caserne Napoléon (rue de Rivoli, rue de Lobau, place Baudoyer et place Saint-Gervais). Cette exposition réunit 42 artistes français et internationaux présents à Paris le jour des attentats. Il leur a été demandé de chercher dans leurs archives une photographie qu’ils auraient prise le 13 novembre 2015 et, en parallèle, de sélectionner un de leurs clichés comme « réponse aux attentats ».

. « 13 novembre 2015, Paris se souvient », sur la place de la République.

Constituées de clichés réalisés par les photographes de la Ville les jours suivant le 13 novembre, ces deux expositions reviennent sur les élans de fraternité et de solidarité qui ont traversé la ville au lendemain des attentats.

. Exposition « Face au terrorisme, une mémoire citoyenne » (du lundi 3 au dimanche 30 novembre 2025)

Cette exposition s’inscrit dans une séquence nationale de mémoire et de mobilisation. Elle accompagne le développement du Musée-mémorial du terrorisme en présentant pour la première fois au grand public une partie de ses futures collections permanentes. Elle présente des dons de proches de victimes et d’institutions impliquées dans la lutte contre le terrorisme, ainsi qu’un scellé judiciaire d’une affaire définitivement jugée. Loin de se limiter à l’entretien du souvenir, mémoire individuelle et mémoire collective se rejoignent dans un engagement citoyen, qui témoigne de la résistance et de la résilience de nos sociétés.

Cette exposition préfigure l’ouverture du futur musée, dont les collections comptent déjà près de 3 000 pièces : dons de victimes, témoignages et scellés judiciaires. Porté par l’engagement des pouvoirs publics et des associations de victimes, le Musée-mémorial du terrorisme se veut un lieu de résilience et de résistance.

  • Un musée-mémorial du terrorisme dans Paris 

Le Musée-mémorial du terrorisme (musee-memorial-terrorisme.fr/) devrait ouvrir ses portes en 2030, dans le 13ème arrondissement de Paris, au lieu de Suresnes, ville dans laquelle son installation avait été pressentie.

Ce musée a pour vocation de rendre hommage aux victimes du terrorisme à l’échelle de la France et du monde. C’est aussi un musée d’histoire et de société, tourné vers la connaissance et la pédagogie. Il abordera pour la première fois le terrorisme contemporain sur une longue période et sous toutes ses formes. Il offrira ainsi un parcours scientifique et pédagogique permettant d’éclairer le présent par la connaissance du passé.

Il s’appuie sur une exposition permanente constituée autour de trois thématiques : l’histoire du terrorisme, la voix des victimes et la question de la réaction des sociétés.

Selon le site dédié au projet, il sera « conçu comme un lieu de mémoire et d’histoire sur cette violence de guerre en temps de paix qui a marqué la société française ainsi que de très nombreux autres pays depuis les années 1970 ».

Un musée-mémorial sur les attaques terroristes depuis 1974

Contrairement aux musées-mémoriaux existant à l’étranger, le musée-mémorial du terrorisme ne portera pas sur un seul attentat mais sur tous ceux commis depuis l’attaque du Drugstore Publicis en 1974.

Il y sera question d’attentats anarchistes, nationalistes, tiers-mondistes, et aussi jihadistes.

Le musée-mémorial rejoindra ainsi la dizaine d’édifices dédiés à des attentats à travers le monde, dont celui d’Oklahoma City (attentat de 1995) ou encore à Oslo (tuerie d’Utoya en 2011) et ceux à New York dédiés aux attaques du 11 septembre 2001.

L’historien Henry Rousso qui pilote le projet souhaite répondre à des questions telles que « Comment la société française et d’autres sociétés ont réagi, se sont transformées à cause du terrorisme ? Comment ont-elles fait face ? ». Henry Rousso souhaite également que « ce lieu lié à la mort soit un lieu de vie ».

. Un lieu de mémoire

Une place importante sera accordée aux victimes. Leurs noms seront probablement inscrits. Les secouristes seront aussi mis en avant.

Le lieu compte également collecter des objets auprès des victimes et des témoins de ces sinistres événements, pour rendre le lieu « plus humain et incarné ».

Il abritera déjà les quelque 3 000 pièces que compte déjà la collection permanente en cours de constitution : dons de victimes, témoignages et scellés judiciaires. Autant d’objets « qui retracent les récits de vie confrontées soudainement au terrorisme », peut-on lire sur le site de l’institution.

L’idée : faire de ce musée à la fois un lieu de reconnaissance où l’on rend hommage et un lieu de connaissance avec le souci de la transmission notamment à destination des scolaires.

. 13ème arrondissement de Paris, au lieu de Suresnes

Le projet de musée-mémorial du terrorisme voulu par Emmanuel Macron trouvera finalement son emplacement dans une caserne de pompiers désaffectée du XIIIe arrondissement de la capitale comme l’a révélé France inter le 4 novembre 2025.

C’est un tournant majeur pour ce projet mémoriel. Initialement, ce projet porté par le président de la République devait prendre place au Mont Valérien, à Suresnes (Hauts-de-Seine). Mais cette option a finalement été écartée en raison de coûts jugés trop élevés.

La mission de préfiguration du musée-mémorial, dirigée par l’historien Henry Rousso, spécialiste reconnu de la Seconde Guerre mondiale, a donc jeté son dévolu sur la caserne Lourcine, un choix entériné par Emmanuel Macron lui-même, qui en a informé les associations de victimes des attentats de 2015.

Ce bâtiment de 3 000 m2 présente plusieurs avantages décisifs. Sa localisation dans Paris constitue un atout majeur. Le bâtiment nécessite par ailleurs relativement peu de travaux de réhabilitation. Autre point positif : le site permettra de conserver l’essentiel de la scénographie initialement prévue pour le Mont Valérien. Les premières évaluations budgétaires semblent indiquer que ce projet coûtera deux fois moins cher que celui de Suresnes.

musee-memorial-terrorisme.fr/

SOURCES : Ville de Paris, Musée Mémorial du Terrorisme, presse

PHOTOS : Ville de Paris

PHOTO du carrousel : le jardin mémoriel Jean-Baptiste Gurliat / Ville de Paris

Date de première publication : 13/11/25

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