Le 8 août 2017, le Ministère de la Culture a apporté son soutien aux Archives nationales, qui ont décidé le 21 juillet 2017 du principe de gratuité pour l’ensemble des droits de réutilisation des informations publiques contenues dans les documents produits ou reçus par l’institution. Une première pour une institution culturelle nationale en France.
Ce service à compétence nationale a pour principale mission « de collecter, trier, classer, inventorier, conserver, restaurer, communiquer et mettre en valeur les archives publiques provenant des administrations centrales de l’Etat et des pouvoirs constitués depuis les origines », selon l’arrêté du 24 décembre 2006.
Comme l’explique le site nextinpact.com « jusqu’en juillet 2017, réutiliser ces informations n’était pas gratuit. En application d’une décision du 10 décembre 2010, des tarifs étaient affectés aux informations publiques selon les supports. Ainsi, leur réutilisation sur Internet dépendait du nombre de vues. De 1 à 100 000 vues, il fallait verser 0,35 euro par an et par reproduction ou par téléchargement sur le site des Archives. Au-delà d’un million de vues, le prix était de 0,04 euro. Pour la réutilisation des images pour des documents supérieurs au format de 50 x 50 cm, comme les cartes et les plans, les tarifs variaient cette fois de 20 euros à 3 euros, toujours selon le nombre de vues ».
Le choix de l’open content
Le 21 juillet 2017, Françoise Banat-Berger, directrice des Archives nationales, a décidé de renverser cette logique et a abrogé le tarif de 2010. Le principe devient celui de la gratuité, du moins pour les documents sur lesquels des tiers ne détiennent pas de droits de propriété intellectuelle.
C’est ainsi que les Archives nationales, en lien étroit avec le service interministériel des Archives de France, ont publié un nouveau régime de réutilisation des informations publiques qu’elles conservent, qu’il s’agisse des inventaires ou des corpus d’archives. Il s’agit de documents librement communicables à tous et sur lesquels des tiers ne détiennent pas des droits de propriété intellectuelle.
Le lecteur dispose ainsi d’un droit non exclusif de libre « réutilisation » à des fins commerciales ou non, dans le monde entier et pour une durée illimitée. Il suffit que ces informations soient librement communicables au sens de l’article L.213-1 du Code du patrimoine et qu’elles n’aient pas été communiquées par autorisation ou par dérogation.
Comme l’écrit le ministère dans son communiqué: « dans la droite ligne de la loi pour une République numérique, le ministère de la Culture est engagé dans une politique d’ouverture et de partage des données publiques, notamment pour permettre aux citoyens de participer à l’amélioration de la qualité des données ».
Les seules contraintes sont de respecter l’intégrité des informations, et de préciser l’origine (« Archives nationales (France) », date, référence, l’auteur et du titre du document s’il y a lieu).
Cette décision s’appuie sur la loi du 28 décembre 2015 relative à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public, et celle pour une République numérique du 7 octobre 2016. La première, dite loi Valter, avait posé ce principe de gratuité mais ouvert cependant plusieurs exceptions permettant d’y échapper.
Une page se tourne !
Sur son compte Twitter @calimaq, le juriste et bibliothécaire Lionel Maurel salue l’initiative : c’est la « première fois qu’une institution de ce plan en France passe à une politique complète d’OpenData et d’OpenContent ».
J’ai bien l’impression que tu ne rêves pas o/
— P-Y (@Pymouss) 24 juillet 2017
Sur son site web S.I.LEX, il publie également un article titré ‘les archives nationales ouvrent la voie de l’Open Content ».
Dans cet article, Lionel Maurel écrit: « Lentement (mais sûrement), les choses sont en train de bouger dans le monde culturel en faveur de l’ouverture des données. J’ai déjà eu l’occasion d’écrire à ce sujet en avril dernier à propos de l’évolution graduelle des politiques des bibliothèques, mais c’est du côté des archives publiques qu’une excellente nouvelle est tombée cette semaine : les Archives nationales ont adopté un nouveau règlement appliquant un principe de gratuité par défaut pour la réutilisation des informations publiques qu’elles détiennent … La décision des Archives nationales de passer à un Open Data par défaut a une portée symbolique importante, car le domaine des archives publiques est certainement l’un de ceux pour lesquels la réutilisation a soulevé jusqu’à présent le plus de crispations. … l’application de la gratuité par défaut aux AN reste un message important envoyé à l’ensemble de la sphère des archives, et même au-delà. … Le secteur culturel le plus en retard en France en matière d’ouverture reste celui des musées. … Les Archives nationales ont été créées à la Révolution française par la loi du 7 messidor de l’An II qui affirmait un principe de libre consultation des documents d’archives reconnu à tous les citoyens. Plus de deux siècles plus tard, une nouvelle page de cette histoire se tourne avec le passage à un principe de libre réutilisation des données, qui constitue le prolongement moderne de cette philosophie républicaine. »
Les Archives de France et les Archives nationales ont déjà publié plusieurs corpus librement réutilisables sur la plateforme de données ouvertes du ministère data.culturecommunication.gouv.fr. On y trouve déjà 24 000 inventaires et plus de 8 millions d’images.

Signalons également que les Archives nationales avaient déjà commencé à s’engager dans cette voie de l’open content grâce à un partenariat conclu avec Wikimedia France pour la libre diffusion sur Wikipedia Commons de plus de 500 documents numérisés issus de leurs collections.
Sur son site, Wikipedia France dresse un bilan très positif de la coopération: « au total, ce sont pas moins de 923 articles qui ont été modifiés sur Wikipédia et 5 téléversements de corpus de 30 à 60 documents qui ont été effectués sur Wikimedia Commons (dont le dernier est en cours de finalisation). En 20 mois, les documents mis en ligne ont d’ailleurs comptabilisé plus de 30 millions de vues indirectes !
En parallèle de ces téléversements, 4 ateliers d’écriture ont été organisés pour les agents des Archives nationales. Ces ateliers de formation à la contribution étaient encadrés par des wikimédiens bénévoles, en vue de favoriser l’autonomie des personnes et de pérenniser leurs contributions ».
SOURCES: Archives Nationales, Ministère de la culture et de la communication, scinfolex.com, nextinpact.com
Date de première publication: 10/08/2017
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