Le concept de films d’exposition destinés aux salles de cinéma débarque enfin en France. La RMN-Grand Palais a accepté de s’associer avec Seventh Art Productions, la société de Phil Grabsky spécialisée dans ce type de film pour produire un documentaire consacré à l’exposition du Musée du Luxembourg “Paul Durand Ruel”. Le film devrait sortir dans les salles obscures du monde entier le 26 mai 2015.
Une première française
Si des films d’expositions ont déjà été diffusés dans les salles de cinéma des circuits français de Pathé ou Kinepolis, c’est la première fois qu’un tel film sera consacré à une exposition française.
Comme l’explique Virginie D’allens, chef du département Multimédia Audiovisuel de la RMN-GP: “l’idée est venue de la société de production anglaise Seventh Art dans le cadre de la collection Exhibition on Screen qui compte déjà plusieurs productions sur des films d’expositions projetés au cinéma mais n’avait jamais produit de film au sujet d’une exposition française. C’est donc une première !
Le concept du film consiste à faire découvrir une exposition sur grand écran. Il s’agit d’une captation de l’exposition en qualité cinéma, ponctuée d’interviews des commissaires de l’exposition, de spécialistes et de représentants de la famille Durand-Ruel. La trame est aussi composée d’une séquence biographique sur le collectionneur Paul Durand-Ruel, et des focus sur des thématiques particulières.“
La RMN-GP “n’est pas coproductrice de ce film mais elle en est partenaire, au même titre que le musée d’Orsay“. Elle a facilité sa production notamment en accompagnant sur la gestion des droits. “Chaque œuvre a fait l’objet d’une demande d’exploitation auprès du musée préteur ou du particulier préteur.”
Le film sortira au printemps alors que l’exposition aura fermé ses portes au Musée du Luxembourg mais les œuvres seront alors exposées à la National Gallery de Londres (jusqu’au 31 mai 2015) puis au Philadelphia Museum of Art (du 24 juin au 13 septembre 2015). Le film n’accompagnera donc pas la promotion de l’exposition mais contribuera cependant à l’image internationale du Musée du Luxembourg.
INTERVIEW : Phil Grabsky, réalisateur et producteur, PDG de la société Seventh Art
Le Clic France a profité du tournage du film le 18 novembre 2014 au Musée du Luxembourg pour interroger son producteur et réalisateur.
Pouvez-vous vous présenter ?
Phil Grabsky: je suis britannique et j’habite à Brighton, East Sussex. Avec mon entreprise Seventh Art Productions, j’ai produit de nombreux documentaires pour la télévision et le cinéma, tels que “Muhammad Ali: Through the Eyes of the World”, “The Boy who Plays on the Buddhas of Bamiyan” (2003), la série “In Search Of” (sur Mozart, Beethoven, Haydn et Chopin (de 2006 à 2015), “Escape from Luanda” (2007) et “The Boy Mir – Ten Years in Afghanistan” (2011).
J’ai également produit plus de 120 épisodes de la série sur l’art “Tim Marlow art shows” qui ont été diffusées par des chaines TV depuis plus de 10 ans. Seventh Art est également à l’origine du 1er film sur l’art en 3D “Tim Marlow on British Sculpture at the Royal Academy of Arts”. Au total, ma société a produit 43 films sur l’art.
Quand est née l’idée de faire des films d’art pour le grand écran ?
PG: En 2011, nous avons apporté pour la première fois une grande exposition dans les salles de cinéma en produisant le film Leonardo Live (page sur IMDB) diffusé depuis la National Gallery de Londres. Nous avons ainsi créé l’événement car il s’agissait de la première diffusion live dans des salles de cinéma d’un événement tourné dans une galerie ou un musée.
Combien de films d’expositions ou sur des lieux culturels avez-vous déjà produit pour une diffusion en salles ?
PG: Nous avons commencé avec Leonardo depuis la National Gallery de Londres en 2011. Nous approchons maintenant de notre dixième film produit dans le cadre de la collection “Exhibition on Screen”, avec plusieurs films actuellement en pré-production et en production. Et nous avons maintenant beaucoup des galeries et musées du monde qui viennent nous proposer des projets.
9 films documentaires déjà produits ou en cours de production:
Film / musées | Durée | Sortie mondiale | Trailer |
Leonardo Live (National Gallery / Londres) | 85 min | 16/02/2012 | Youtube |
Exhibition on Screen: Manet – Portraying Life (Royal Academy of Art / Londres) | 90 min | 11/04/2013 | Vimeo |
Exhibition on Screen: Munch 150 (Munch Museum and National Gallery / Oslo) | 88 min | 27/06/2013 | Vimeo |
Exhibition on Screen: Vermeer and Music (National Gallery / Londres) | 85 min | 10/10/2013 | Youtube |
Exhibition on Screen: Matisse Live (Tate Modern / Londres et Moma / NYC) | 90 min | 04/11/2014 | Youtube |
Exhibition on Screen: Girl with a Pearl Earrings and other treasures (Mauritshuis / La Hague) | 90 min | 13/01/2015 | |
Exhibition on Screen: Rembrandt: The Late Works (National Gallery / Londres et Rijksmuseum / Amsterdam) | 85 min | 17/02/2015 | Youtube |
Exhibition on Screen: Vincent Van Gogh: A New Way Of Seeing (Van Gogh Museum / Amsterdam) | 85 min | 14/04/2015 | |
Exhibition on Screen: The Impressionists (Musée du Luxembourg Paris, National Gallery Londres et Philadelphia Museum of Art) | 85 min | 26/05/2015 |
Sources: Seventh Art, Clic France
Trailer de la saison 2014/2015 de la série Exhibition on Screen:
Quelles seront les prochaines sorties de films ?
Exhibition on Screen: Rembrandt: The Late Works sera le prochain film à sortir, le 2 décembre 2014 en Grande Bretagne et le 17 février 2015 dans les salles du monde entier. Suivront en 2015 Exhibition on Screen: Girl with a Pearl Earring et Exhibition on Screen: Vincent Van Gogh: A New Way Of Seeing.
Trailer du film Rembrandt :
Quel est le top 5 des films ayant rencontré le plus grand succès d’audience ?
PG : Tous nos films ont rencontrés le succès parce que nous avons maintenant un public fidèle dans 53 pays qui ont la possibilité de partager les merveilles de ces artistes et leur art mais également les trésors de ces magnifiques institutions. Nous pouvons ainsi apporter ces magnifiques expositions aux spectateurs et amateurs d’art d’Afrique du Sud, du Chili, de Corée ou du Canada.
Quel est le pays qui génère le plus de ventes de tickets pour vos films ?
PG : Nos pays les plus forts en terme de spectateurs sont les Etats-Unis, le Royaume-Unis, la France, l’Italie et l’Australie.
Avez-vous déjà distribué vos autres films dans les salles de cinéma françaises. Quel a été le résultat ?
PG : Oui nous avons déjà diffusés nos films en France (dans une soixantaine de salles) mais je pense que notre diffusion va maintenant se développer puisque nous n’utilisons plus de présentateur de langue anglaise. Je fait les films cinématographiques qui doivent trouver leur public dans le pays le plus cinéphile du monde. Je pense également que cette nouvelle saison propose une programmation qui va être très attractive pour le public français avec notamment “Matisse”, “Van Gogh”, “Rembrandt”, “la jeune fille avec une boucle d’oreille de perles” et surtout pour la première fois un film sur une exposition fabuleuse organisée en France, au musée du Luxembourg.
En effet, pour la première fois, vous allez produire un film sur une exposition française. Qui a eu l’idée de ce projet de film ?
PG: nous avons souhaité faire ce projet et nous l’avons proposé à la RMN-GP qui a accepté d’entre partenaire.
C’est la première fois qu’un tel film d’exposition est produit en France. Cela a-t-il été plus difficile en France ?
PG : Non, il n’y a pas de difficultés particulières de travail en France mais nous n’avions pas eu l’occasion de le faire avant. Nous bénéficions du merveilleux avantage et privilège de travailler avec des experts français dans les institutions françaises que j’apprécie particulièrement. Je suis donc ravi de produire le premier film d’exposition en France avec la RMN-GP et j’espère en faire beaucoup.
Quel est le concept du film ?
PG : il s’agit de faire découvrir cette exposition majeure en mêlant interviews des commissaires de l’exposition, de spécialistes et de représentants de la famille Durand-Ruel. Le film doit être le reflet fidèle de cette fabuleuse exposition qui se rendra ensuite à la National Gallery de Londres (du 4 mars au 31 mai 2015), puis le Philadelphia Museum of Art (du 24 juin au 13 septembre 2015) et qui offre un éclairage nouveau et fascinant sue l’histoire des impressionnistes.
Le film aura-t-il un animateur ?
PG : non, j’en suis venu à la conclusion que les présentateurs ajoutent une barrière entre l’art et le public et qu’ils réduisent le caractère universel des films. En outre, le présentateur fait très «télévision» alors que nous faisons avant tout les films pour le public de cinéma.
Quel est le budget du film ?
PG : C’est la partie la plus difficile de ce projet avec un budget de 400 000 $ pour ce film. Cela fait beaucoup de recettes à récolter ensuite dans les salles de cinéma.
Qui finance cette production ?
PG: Comme pour tous nos films, nous tenons à les financer nous-mêmes pour le moment. Nous nous engageons à 100%, mais cela signifie que je risque 100%. Mais je préfère réduire mes revenus que de faire des émissions de téléréalité sur les adolescents qui tentent de gagner des concours de chant. La télévision et le cinéma ont un potentiel énorme, non seulement pour divertir, mais aussi pour éduquer et montrer au monde ce que nous, hommes et femmes, sommes capables de faire et créer. C’est pour cela que je produis autant de films sur l’art et la culture.
Comment se gèrent les droits pour les œuvres prêtées par d’autres musées ?
PG : Chaque œuvre fait l’objet d’une demande d’exploitation auprès du musée préteur ou du particulier préteur, et dans le cas du film tournée à Paris, la RMN-GP m’a aidé à faire cette discussion. La gestion des droiits est notre responsabilité – avec l’aide des musées. Et c’est un poste qui peut être très coûteux.
Combien de temps ont duré la production et le tournage ?
PG: La production a duré environ neuf mois et implique beaucoup de recherche et de planification. Nous essayons d’être très efficace dans les musées et galeries car nous savons qu’ils sont très occupés, surtout quand une exposition s’ouvre. Pour ce film, le tournage a duré 2 jours pendant l’installation de l’exposition pour des images de coulisses puis une nuit dans l’exposition pour la captation en elle-même ainsi que pour les interviews in situ. Il y a eu également une journée au musée d’Orsay pour d’autres interviews et quelques plans de coupe de certains tableaux. A cela s’ajoutent quelques tournages extérieurs à Paris. Nous avons également filmé à Philadelphie et Londres.
La Réunion des musées nationaux n’est pas coproductrice mais partenaire. Dans les autres pays où vous avez produit de tels films, quelles étaient les modalités d’implication des musées ou institutions culturelles ?
PG: comme nous sommes les seuls financeurs de nos films, nous avons les mêmes relations avec les autres institutions.
Le film sera distribué dans les salles de cinéma dans le monde entier ?
PG : Oui , le film sera distribué en France et dans 52 autres pays. Soit une audience extraordinaire ! Pour le film tourné en France, nous n’aurons pas le film prêt lors avant la fin de l’exposition réelle, ce qui est souvent la cas. C’est un film très compliqué qui a besoin d’une longue phase de montage. Nous voulons également nous assurer que nous avons en France le nombre maximum de cinémas qui le diffuseront. Bien que la nouvelle saison a commencé avec MATISSE de la Tate Modern et du MOMA, nous avons besoin de plus de temps pour faire en sorte que ce film sur les impressionnistes soit un grand film qui sera vu pendant des décennies et un film qui pourra être diffusé dans plus de 100 salles de cinéma quand il sortira en France. Normalement sa sortie mondiale est prévue le 26 mai 2015. Comme pour “Rembrandt”, le film sur les Impressionnistes devrait être diffusé avec des sous-titrages dans au moins 7 langues.
Le film sera-t-il également vendu en dvd ?
PG : oui absolument. Ce film doit avoir la diffusion la plus grande, en salle puis en dvd ou en VOD. Nous serions ravis qu’il soit également vendu en dvd en France et notamment dans les boutiques de la RMN-GP, en respectant le délai des 3 mois après la sortie en salle. C’est très important.
Le film pourrait-il être diffusé par des chaines TV ?
PG: Il faut avant tout voir des films de cinéma dans les salles de cinéma. Une diffusion TV même sur de grands écrans ne se compare en aucune façon. Cela dit, peut-être qu’après six mois ou plus, nous autoriserons la diffusion du film la télévision pour qu’il atteigne une plus grande audience.
Avez-vous déjà un autre projet de film d’expo en France ?
PG : oui mais c’est encore un secret.
Quel est votre meilleur et pire souvenir depuis 2011 ?
Le plus difficile a été le premier film qui portait sur l’exposition Leonardo de la National Gallery de Londres. Nous l’avons réalisé et diffusé en direct parce que nous pensions que c’était la meilleure façon de le faire et de proposer ainsi une visite en avant première. Il a fallu deux ans de planification très complexe et le projet a été très cher. Mais c’était aussi le premier film d’exposition à être diffusé dans des centaines de salles de cinéma et cette première expérience a démontré aux cinémas que le public voulait voir ces films. Le film fantastique est aujourd’hui disponible sur DVD pour les amateurs d’art. Aujourd’hui nous ne faisons plus de captation en direct. C’est beaucoup mieux de passer des semaines dans la salle de montage.
Quant aux meilleurs souvenirs, ils sont nombreux! Je pense notamment aux bonnes critiques que nous avons obtenues dans le monde pour le film sur Manet tourné à la Royal Academy. Nous avons été mentionné en première page de beaucoup de journaux très importants. Et plus récemment, mon souvenir de mes premiers pas dans le Musee du Luxembourg et la découverte de l’exposition “Paul Durand Ruel” la première fois. Sylvie Patry (la commissaire de l’exposition) et son équipe ont réalisé un formidable travail.
Quels sont vos rêves ?
PG : Je veux continuer à construire un public pour la série EXPOSITION SUR ECRAN et pouvoir un jour produire des films sur l’art dans de nouveaux pays et de nouveaux musées. Je souhaite que plus d’écoles en Syrie ou au Pakistan, de salles de villages au Kenya ou en Chine, de salles de cinéma au Venezuela ou au Maroc puissent présenter et faire aimer les films que nous produisons. Surtout, je dois survivre financièrement afin que je puisse continuer à faire les films que j’aime.
Propos recueillis par mail le 30/11/2014
Date de première publication: 03/12/2014
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