Depuis février 2014, le musée des beaux-arts de Lyon propose aux internautes 13 peintures de ses collections en très haute définition. Une visite inédite, et une manière originale de rapprocher le musée, ses œuvres et son public. Présentation du projet et explications par Stéphane Degroisse (Chargé du site internet et des nouveaux médias) et Guillemette Naessens (Responsable du service communication).
Ce mode d’exploration de la collection, très innovant, permet de découvrir des informations iconographiques dans des tableaux riches de détails. Il permet également de faire mieux comprendre le travail des artistes (Belloto, Corot, Biagio d’Antonio, Pissarro, Renoir, Jan Brueghel), leur coup de pinceau, leur jeu avec les formes, les lumières et les couleurs.
Cette plongée dans les détails des œuvres (un milliard de pixels) s’accompagne parfois de compléments d’informations, des commentaires écrit ou vidéo qui explicitent le sujet, l’histoire du tableau, et le met en rapport avec d’autres œuvres.
L’opération a également fait l’objet d’animations ludiques sur facebook qui ont fortement dopé la présence du musée sur ce réseau. Cette innovation a été rendue possible grâce un partenariat avec la société En Détail. (voir l’interview ci-dessous)
Tableaux reproduits en gigapixels
. Camille Pissarro, Kewgreens, 1892
. Pierre-Auguste Renoir, Jeune fille au ruban bleu, 1888
. Alfred Sisley, Chemin montant, 1870
. Jean Auguste Dominique Ingres, L’Arétin et l’envoyé de Charles Quint, 1848
. Jean-Baptiste Camille Corot, Champ de blé, vers 1842
. Bernardo Bellotto, Le Grand Canal à Venise, vers 1736-1740
. Gerrit Berckheyde, Le Grand marché à Haarlem, 1673
. Jan Brueghel l’Ancien, dit de velours, L’Air, 1611
. Jan Brueghel l’Ancien, dit de velours, L’Eau, sans date
. Jan Brueghel l’Ancien, dit de velours, La Terre, 1610
. Jan Brueghel l’Ancien, dit de velours, Le Feu, 1606
. Véronèse (Paolo Caliari, dit), Bethsabée au bain, Vers 1575
. Biagio d’Antonio, La Vierge à l’enfant et Saint Jean Baptiste, XVe siècle
Corot, Pissarro, Renoir, Ingres, Véronèse… Comme l’explique le musée sur son site “découvrez ces œuvres comme vous ne les avez sans doute jamais vues ! Et revenez au musée les admirer dans les salles.”
Déjà une oeuvre en gigapixels en 2012
En décembre 2012, le musée des Beaux-Arts de Lyon avait fait appel pour la première fois à une souscription publique pour acquérir une oeuvre d’Ingres, «L’Aretin et l’envoyé de Charles Quint».
Pour remercier les 1500 donateurs, le musée avait souhaité mettre en ligne une version Très Haute Définition du petit tableau (41,5 x 32,5 cm). Déjà réalisée avec la société Endétail, cette numérisation avait nécessité un mois et demi de tests en tout genre, un assemblage de 80 photos de 40MP (pentax 645d), une cinquantaine d’heure de postproduction sans compter les heures de calcul de rendu et au final une image de 40000 pixels sur 50000 soit…2 milliards de pixels!
4 QUESTIONS A … Stéphane Degroisse (Chargé du site internet et des nouveaux médias) et Guillemette Naessens (Responsable du service communication)
Quel était l’objectif principal de ce projet ?
Les objectifs sont multiples. Ces photographies en ultra-haute définition offrent une navigation incroyable dans les œuvres, jusque dans leurs moindres détails, et offrent notamment au service culturel l’opportunité de faire des captures d’écran avec de gros plans incroyables pour les médiations avec le public. Pour le service conservation, elles offrent l’avantage d’approcher l’œuvre comme rarement auparavant et de pouvoir analyser la matière picturale de manière très fine.
Pour le service communication, le projet est porté pour communiquer de manière interactive avec le public et l’encourager à découvrir cette nouvelle façon de voir les œuvres, puis de venir (ou revenir) les admirer dans les salles du musée.
Une page dédiée a été créée sur le site, qui rassemble la douzaine de tableaux disponibles en navigation en ultra-haute définition. Cette page est enrichie avec les nouveaux tableaux photographiés par Endétail au fil des mois.
Et cette opération a été relayée sur facebook de manière très originale.
Oui, sur facebook, nous avons eu l’occasion d’organiser des jeux pour nos fans à partir des œuvres en gigapixels.
Par exemple pour souhaiter les vœux 2014 sur leur page Facebook, Endétail a intégré 14 faux détails (Quasimodo en haut d’une église, La mouette de Gaston Lagaffe dans le ciel hollandais, bouteille de coca dans un panier, iPhone dans une main, poubelles de tri, étiquette Office de Tourisme ou Relais & Châteaux…) sur un superbe tableau : Le Grand marché à Haarlem de Gerrit Berckheyde, 1673.
Nous avons relayé ce jeu des 14 erreurs et avons recueilli de nombreuses réactions et une participation importante de la part de nos fans. Au-delà de la simple navigation et de l’admiration des œuvres, ce projet permet une réelle interaction du musée avec son public online.
Nous avons réitéré l’opération le 20 février dernier sur notre page Facebook à partir d’un tableau de Brueghel l’Ancien, dit de velours, Le Feu, 1606 : 21 commentaires et joueurs, 93 partages, 20 184 personnes ont vu cette publication. La mécanique de jeu était la suivante: 7 erreurs (billet de 50€, sécateur, euros en pièces…) se sont glissées dans Le Feu, l’un des quatre tableaux de la série Les Eléments de Brueghel… Les 5 premiers à les trouver remportaient deux places pour notre prochaine exposition, L’Invention du Passé, qui ouvre le 19 avril. Un indice: vous pouvez naviguer dans le tableau original (en gigapixels) à la une de notre site…
C’est ce type de conversation que l’on peut envisager avec le public sur la page Facebook qui permet une vraie proximité, une liberté de tons, une conversation de connivence et enrichissante. La régularité et l’originalité portent leurs fruits : le nombre de fans du musée sur Facebook a fortement augmenté depuis 2013, et continue sa croissance constante. 10 000 fans en janvier 2013, 34 000 en janvier 2014 et 61 900 le 19 mars 2014 !
Combien d’œuvres envisagez-vous de proposer en gigapixel ? à quelle échéance ?
Ce chiffre sera décidé et adapté en fonction des opportunités. Les expositions en sont une, les chefs-d’œuvre et la mise en valeur de nos collections permanentes en sont une autre. Cela répond directement aux missions des musées : contribuer aux progrès de la connaissance, rendre les collections accessibles au pus grand nombre, mettre en place des actions d’éducation et de diffusion…
Depuis début 2013, date du début de la collaboration avec Endétail, plus d’une douzaine d’œuvres a été photographiée et mise en ligne (site du musée, site d’Endétail, réseaux sociaux). Les œuvres sont sélectionnées par Endétail et le musée, après la validation des conservateurs, afin de proposer des tableaux d’époques et de formats différents, pour refléter la richesse et la diversité des collections du musée ainsi que l’avancée de la technique des photographes.
Des œuvres encore récemment photographiées seront prochainement mises en ligne, notamment pour inciter le public à découvrir deux œuvres centrales présentées dans la prochaine exposition du musée, L’Invention du Passé, Histoires de cœur et d’épée en Europe, 1802-1850. Il s’agit de L’Arétin et l’envoyé de Charles Quint, de Jean Auguste Dominique Ingres, déjà en ligne, et du tableau Le Tournoi, de Pierre Révoil, à découvrir en détail prochainement.
Quel est le modèle économique / mode de financement de ce projet ?
Il s’agit d’un accord entre Endétail et le musée : le projet a été proposé au musée par Endétail (et ses deux photographes Gilles Alonso et Matias Antoniassi), qui voulait perfectionner sa technique de photographie en ultra-haute définition, en prenant pour base de travail les collections du musée des Beaux-Arts de Lyon.
Au départ, ils ont pris du temps pour se caler, installer leur matériel, mesurer et tester leurs réglages, en fonction des éclairages des salles (lumières artificielle et naturelle) et des contraintes posées par les tableaux choisis. Après quelques mois d’expérimentation et des sessions successives au musée, ils peuvent désormais photographier toutes sortes de formats de tableaux.
Le musée porte ce projet auprès de son public, lui permettant d’avoir un accès nouveau et exceptionnel à certaines œuvres de ses collections. L’opportunité pour le musée de pouvoir proposer une douzaine d’œuvres en gigapixels à son public est réellement exceptionnelle, et nous nous réjouissons de continuer à enrichir cette série d’œuvres grâce au travail d’Endétail.
Interview réalisée par mail le 19/03/2014
SOURCES: Musée des Beaux arts de Lyon, chassimages.com
Date de première publication: 20/03/2014
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