Corinne Lebon, Alto onsite: “l’audioguide a encore de belles années devant lui, même si le support continue d’évoluer”

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Temps de lecture : 9 min

En juillet 2021, Antenna International France est devenue ALTO onsite. La société spécialisée dans la production des contenus et la gestion des audioguides culturels a changé de marque commerciale et d’actionnaires mais conservé son équipe et ses clients prestigieux. 3 mois après cette transformation, Corinne Lebon, l’une des 3 co-fondatrices et directrice exécutive d’ALTO onsite partage sa vision sur l’avenir de l’audioguide, dans le monde post-confinement et dans le contexte de mutation technologique accélérée. Elle annonce également l’arrivée de nouveaux clients et dévoile ses projets en cours.

[EVENT CLIC] Le 17 novembre 2021, de 10.00 à 12.00, les membres du CLIC France sont invités à une visite du Palais Garnier, guidée par la tablette de médiation.

Visite organisée avec l’Opéra de Paris et Alto On site (anciennement Antenna International France).

Visite réservée à 40 membres du CLIC France. Inscriptions ouvertes : visite@club-innovation-culture.fr

  • La société Antenna International France devient ALTO onsite. Ce changement de nom commercial est-il une conséquence du covid-19 ? 

Oui dans une certaine mesure si on considère que l’issue n’aurait certainement pas été la même s’il n’y avait pas eu cette crise sanitaire.

Corinne Lebon, l’une des 3 co-fondatrices et directrice exécutive d’Alto onsite

Depuis mars 2020, notre secteur subit de plein fouet les effets de cette crise. Le premier confinement puis le deuxième six mois plus tard, les fermetures et les réouvertures avec une baisse significative de la fréquentation internationale ont mis à mal tout un pan économique lié au tourisme et à la culture.

Nombre de sociétés en France comme à l’international ont dû mettre la clé sous la porte et notre société mère anglaise, privée d’activité pendant plusieurs mois consécutifs n’a pas survécu, laissant à ses filiales la possibilité de prendre leur destin en main.

Si la marque Antenna International s’est éteinte avec la pandémie, de notre côté, nous y avons vu l’opportunité de nous émanciper en rachetant 100% des part sociales d’Antenna Audio sarl et en garantissant ainsi la continuité de service auprès de nos clients et partenaires historiques.

La marque ALTO onsite a vu le jour en juillet 2021, pour notre plus grande satisfaction marquant définitivement une nouvelle ère.

  • Ce changement de nom induit-il un changement d’équipe ? 

Absolument pas. La structure française n’a pas changé d’un iota. Il s’agit de la même équipe dans son intégralité.

Charline Huet et Elfi Barat, co-fondatrices d’AlTO onsite 

  • ALTO onsite conserve t-elle les clients et les références d’Antenna International France ? 

Lors de la reprise, nous avons souhaité informer tous nos partenaires de notre volonté d’assurer la continuité de service et tous sans exception nous ont réitéré leur confiance et apporté leur soutien. Nous avons conscience d’être chanceux et nous nous réjouissons de continuer à travailler avec nos partenaires historiques: l’Opéra national de Paris, le musée du Quai Branly – Jacques Chirac, le musée Rodin, les musées de la ville de Paris, le musée Unterlinden de Colmar etc.

Depuis, nous continuons d’accroître la liste de nos clients et références en France et à l’étranger. Nous comptons dorénavant le musée Grévin, Big Bus Tour, et TAAICA une agence à Taiwan entre autres.

Nous sommes également en train de refondre les contenus du château de Chantilly, pour l’application développée par Mazedia et venons juste de finir la production des contenus de l’application du Palais Galliera pour Paris musées.

  • Liquidation, rachat … le marche français de l’audioguide a connu de nombreuses restructurations ces derniers mois. Le secteur peut il survivre à la pandémie ? Comment voyez-vous l’avenir de ce secteur et de cette activité en France ? 

Ces restructurations ne sont pas propres au marché français et ne sont pas propres non plus à notre secteur d’activité.  Nous avons traversé une crise sanitaire sans précédent mais les crises, quelles qu’elles soient, ont le mérite de remettre en question les modèles établis et obligent les professionnels à repenser leur offre.

Nous avons assisté à une transformation du secteur du tourisme et cela risque de durer au moins pour les 12 prochains mois. Nos clients vont être amenés à se tourner davantage vers le public de proximité et nous pouvons les accompagner, en proposant par exemple des offres « événements », à même de toucher un public plus jeune par exemple ou familial.

  • Quelles sont vos ambitions ?

ALTO onsite a pour ambition de devenir le leader français de la médiation culturelle et l’un des tous premiers acteurs européens du secteur en capitalisant sur notre savoir-faire et celui de nos partenaires historiques mais également en travaillant avec les talents de start-ups.

Enfin, je suis d’un naturel optimiste donc si vous me demandez comment je vois l’avenir de notre secteur et plus particulièrement de notre activité en France, je vous dirai que le meilleur reste à venir avec pour horizon les JO de 2024.

  • On a souvent prédit la mort de l’audioguide, remplacé par les applications, les guides multimédias, voire les chatbots. Mais cet outil de médiation a survécu. Comment expliquez-vous cette résistance ? 

Effectivement. Cela fait plus de 10 ans que je travaille dans cette industrie et tous les ans, j’entends dire « L’audio guide est mort ! ».

Croyez-le ou non, je pense qu’il a encore de belles années devant lui. Il est normal que le support évolue, l’arrivée des smartphones notamment lui a permis de faire peau neuve.

« Qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse » écrivait Alfred de Musset ? et bien…peu importe le contenant dans notre cas, le contenu prime.

L’émergence du podcast ne fait qu’attester cette tendance de fond : l’audio et ses nouveaux modes de narration, ce que les Anglo-saxons appellent le « storytelling » ont de beaux jours devant eux.

Raconter des histoires, développer notre imaginaire ou encore nourrir notre curiosité sont autant d’atouts à mon sens qui font que les outils de médiation dit « classique » résistent encore.

A titre d’exemple, nous avons mis en place le premier guide multimédia au musée du Louvre en 2007. Nous sommes en 2021 et même si le support physique a été remplacé par une autre machine, il reste le principal outil de médiation in situ. Si le plus grand musée du monde ne l’a pas remplacé, il doit bien y avoir une raison ! Il offre en effet une solution de médiation à plusieurs centaines de milliers de visiteurs français et internationaux par an toujours plus désireux de découvrir les collections à leur rythme grâce à un outil simple et efficace.

  • Comment voyez-vous l’articulation entre audioguide et application mobile ? 

L’audio guide s’appuie sur un modèle économique fort : l’offre et la demande. Ce n’est pas toujours le cas pour les autres outils de médiation. Si quelques institutions font le choix de mettre à disposition des applications gratuites (natives ou webapps), toutes n’ont pas la capacité de financer le développement et la maintenance de ces dernières pour adresser chaque année les nouveaux smartphones et les nouveaux OS. L’audioguide s’adresse à tous les publics dans leur diversité. Il est universel.

Plus largement, je pense que nous nous dirigeons vers une solution mixte qui consisterait à laisser le choix au visiteur.

ALTO onsite propose déjà une offre couplée axée sur le CYOD (chose your own device) qui permet une plus grande latitude comme la mise à disposition d’audioguide ou d’une progressive web app beaucoup moins onéreuse qu’une application native et qui permet aux visiteurs d’accéder aux mêmes contenus en flashant les QR code via leurs smartphones.

  • Comment comptez-vous faire évoluer l’audioguide dans le contexte d’évolution technologique permanente ? 

Chez ALTO onsite, nous pensons que la bonne stratégie est de s’associer avec les meilleurs experts et fournisseurs de solutions technologiques.

Parce que la technologie est trop vite obsolète, cela n’a plus de sens pour nous d’être fabricant de nos propres appareils.

Ce choix  nous permet d’être plus agile et plus libre : nous pouvons maintenant comparer, évaluer les différents prestataires du secteur et proposer la meilleure offre et les meilleurs prix à nos clients.

Nous sommes également très attentifs aux évolutions en matière de déclenchement et de synchronisation, qui permettent un confort de visite et une immersion accrue.

Une visiteuse du château de Vaux le Vicomte

Nous avons testé avec intérêt le parcours immersif de l’Hôtel de la Marine par exemple ou encore celui du château de Vaux le Vicomte, deux expériences bien plus concluantes que la plupart des dispositifs que nous avions pu tester précédemment – mais qui restent selon nous perfectibles et surtout, sont encore bien trop coûteux.

Cette question de l’adéquation entre bénéfice pour le visiteurs et l’institution et coût de production est selon nous la clé de notre industrie.

Nous regardons également avec attention les nouveaux acteurs de la réalité augmentée et virtuelle, notamment pour les sites patrimoniaux.

Nous avons d’ailleurs lancé le premier guide en réalité augmentée du Palais Garnier avec smartApps, Skyboy et Art Graphique et Patrimoine.

Mais l’innovation ne doit pas uniquement se cantonner aux évolutions technologiques. Nous pensons également que cela passe par des contenus innovants (nouvelles écritures, son 3D etc.).

ALTO onsite réfléchit de manière encore confidentielle à une offre spécifique pour l’été 2022… Patientez encore quelques mois, et nous vous en dirons plus….

  • Avec le succès du podcast, le contenu sonore connait une forme de retour. N’est-ce pas le moment idéal pour réhabiliter aujourd’hui le son au sein de l’institution muséale ?

C’est un secteur que nous suivons de très près. Nous avons accueilli les équipes d’Acast dans nos bureaux avant le Covid, nous les connaissons très bien. C’est un secteur foisonnant, passionnant, qui renouvelle considérablement les modes d’écriture de l’audio et correspond à la fois à nos modes de vie (« nomades », connectés) et peut-être aussi à un rejet des écrans, en tout cas pour une certaine partie de la population.

Nous travaillons d’ailleurs avec un certain nombre d’auteurs (je pense à Jeanne Robet, qui a écrit pour nous le parcours en son 3D d’Enfers et fantômes d’Asie) qui viennent de ce monde-là, et collaborent également avec Arte radio par exemple.

Ce que le podcast permet par rapport à l’audioguide, c’est une incarnation plus forte du discours. On a souvent reproché à l’audioguide d’être un media froid et désincarné, certainement parce qu’il est la voix de l’institution.

Le mode conversationnel, un narrateur qui s’exprimerait à la première personne, la captation d’ambiances sonores in situ sont autant de moyens de rendre l’audioguide plus attractifs pour le public.

C’est ce que nous avons tenté de faire pour l’audioguide de l’exposition Ultime combat au musée du Quai Branly par exemple.

  • Comment convaincre les institutions d’investir plus dans la production des contenus ? 

C’est effectivement un sujet important. A l’heure des réseaux sociaux, rating et autres, il est important pour les institutions de maitriser la qualité des contenus qu’ils diffusent.

Choisir le moins disant est toujours à double tranchant, car l’institution prend le risque de voir son nom associé à une prestation médiocre.

Une des solutions consiste à s’adosser les compétences d’un professionnel de la médiation sans avoir à investir grâce à la mise en place de concessions par exemple.

Travailler de concert pour mutualiser les productions à venir en est une autre.

  • Au-delà des audioguides, envisagez-vous d’explorer d’autres formes de médiation sonore telles que les expériences immersives ? 

Absolument. Les expériences immersives en sont une mais il en existe bien d’autres. Comme je l’ai dit précédemment, ALTO onsite travaille actuellement sur une nouvelle offre de médiation qui verra le jour à l’été 2022. Il est encore trop tôt pour vous en parler, mais les lecteurs du site web du CLIC France seront les premiers avertis.

  • L’écosystème français des entreprises développant des outils de médiation muséale est à la fois diversifié, dynamique mais fragile. Comment pourrait-on le soutenir et le renforcer ? 

C’est un vaste sujet et si j’avais la solution, je serais très heureuse de la partager avec vous.

J’entends régulièrement des annonces gouvernementales dont la dernière – datée du 28 septembre -promet une enveloppe de 400 millions d’euros pour soutenir la culture. Certaines industries dites culturelles sont largement aidées : le jeu vidéo ou le cinéma avec le CNC, il est dommage que la médiation échappe encore à ma connaissance à ces possibilités de financement car nous pourrions investir plus encore qu’aujourd’hui avec nos clients et partenaires dans des projets qui permettraient d’adresser des publics plus larges et plus difficiles à capter.

  • Hors de France quel est votre modèle d’audioguide muséal ? 

On regarde de près ce sur quoi travaille Nous au HANS CHRISTIAN ANDERSEN MUSEUM.

Ils ont développé leur propre modèle de casque sonore immersif. Le dispositif a été pensé comme faisant partie intégrante de la scénographie, au même titre qu’un dispositif fixe. Toute une réflexion a été menée sur la fluidité de la narration, en prenant compte notamment les transitions entre les zones de déclenchement, d’éventuels conflits de zone etc.

Nous avons hâte de pouvoir tester ce nouveau dispositif et de partager nos retours avec nos anciens collègues allemands, avec qui nous sommes restés très proches.

Vous l’aurez compris, ALTO onsite ne se limitera pas au marché français… !

ALTO onsite sur les réseaux numériques: Site webLinkedInInstagram

SOURCE: CLIC France

ITV réalisée par mail entre le 26/09 et 5/10/2021

Date de première publication: 06/10/2021

ALTO onsite est membre du CLIC France 

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