Coup de théâtre ou de semonce dans le monde des musées ! « Le gouvernement néerlandais ne tient pas la promesse faite lors de l’accord fondateur historique de 1962 avec VW Van Gogh, le neveu du peintre, également connu sous le nom de « l’Ingénieur », ce qui laisse planer un doute sur l’avenir du musée Van Gogh d’Amsterdam », a déclaré la directrice, Emilie Gordenker, dans le New York Times du mercredi 27 août 2025. « Si le gouvernement néerlandais ne tient pas ses promesses envers « l’Ingénieur », un projet majeur de maintenance vitale ne pourra être financé et le musée sera contraint de fermer » avertit même la directrice, soutenue par la Fondation Van Gogh, à qui appartient encore la vaste collection exposée dans le musée.
« Si cette situation persiste, elle sera dangereuse pour l’art et pour nos visiteurs » , déclare la directrice du musée Van Gogh, Emilie Gordenker, au New York Times. « Si cette situation persiste, elle sera dangereuse pour l’art et pour nos visiteurs. »
- Un musée public né d’un accord historique
Après la mort de Vincent van Gogh, une grande partie de ses œuvres et de sa collection resta dans la famille. En 1962, la Famille Van Gogh et le gouvernement néerlandais ont donc conclut un accord sans précédent afin d’empêcher la dispersion de la collection.
Les descendants de Vincent Van Gogh représentés par son neveu et héritier cédèrent la propriété de l’ensemble de la collection – plus de deux cents tableaux, cinq cents dessins et neuf cents lettres, ainsi que des œuvres de contemporains de Vincent rassemblées au fil des ans – à la Fondation Vincent van Gogh, créée spécialement à cet effet. La collection est aujourd’hui estimée à des milliards de dollars, selon l’article du NY Times et comprend notamment « Chambre à Arles », « Champ de blé aux corbeaux », « Tournesols » et « Amandier en fleurs ».
En contrepartie, l’État néerlandais s’engageait à fournir les ressources nécessaires à la construction et à l’entretien d’un nouveau musée où la collection serait préservée et présentée au public de manière permanente.
- Plus d’1.5 million de visiteurs annuels
Dès son ouverture en 1973, le Musée Van Gogh a rapidement connu un succès national et international remarquable.
Chaque année, il fait revivre l’histoire de l’artiste à plus d’1,5 million de visiteurs grâce à sa collection inégalée de peintures, dessins et lettres de Vincent van Gogh, ainsi qu’à des œuvres majeures de ses contemporains, le tout combiné à des expositions inédites et à des programmes publics innovants.
« Destination culturelle incontournable d’Amsterdam, il renforce non seulement la réputation mondiale de la ville comme capitale de l’art et de la créativité, mais joue également un rôle essentiel dans la présentation du riche patrimoine artistique des Pays-Bas à un public international » précise le musée.
Il est important de noter que le Musée Van Gogh génère 85 % de ses propres revenus – un pourcentage remarquablement élevé par rapport aux autres musées publics –, ce qui témoigne de son succès international et de son attrait économique.
- Un entretien majeur inévitable
Le succès du Musée Van Gogh a également un revers : depuis son ouverture en 1973, il a attiré près de 57 millions de visiteurs, avec un pic de fréquentation de 2,6 millions en 2017.
Or, le bâtiment du musée, propriété du gouvernement néerlandais, n’était pas conçu pour une telle fréquentation.
Après plus de cinquante ans d’utilisation intensive, le musée ne répond plus aux exigences actuelles. Il présente des lacunes en matière de durabilité, de sécurité et de climatisation. Les bâtiments sont en mauvais état, nécessitant des investissements importants pour assurer leur sécurité et leur accessibilité au public.
« La plupart des installations techniques ont atteint la fin de leur durée de vie opérationnelle, sont obsolètes et de plus en plus difficiles à entretenir en raison du manque de pièces de rechange. Par conséquent, la maintenance continue n’est plus réalisable et les systèmes doivent être remplacés » précise le musée.
De plus, des améliorations en matière de durabilité sont obligatoires pour tous les bâtiments publics néerlandais à partir de 2024, ce qui nécessite des modifications importantes et coûteuses des installations. Enfin, un entretien important est nécessaire pour respecter les obligations légales et contractuelles.
- Plan directeur 2028
Le Musée Van Gogh a commandé un plan d’entretien majeur et de mesures essentielles de durabilité, appelé Masterplan 2028. Les travaux devraient débuter en 2028 et durer environ trois ans. Durant cette période, le musée restera partiellement ouvert au public.
Le coût total du Masterplan 2028 s’élève à 104 millions d’euros, dont 76 millions d’euros sont consacrés aux travaux d’entretien, de remplacement et d’investissement ; 23 millions d’euros à la durabilité et 5 millions d’euros aux améliorations.
« Le musée n’est pas en mesure de financer le Masterplan 2028 » annonce le musée, « car le gouvernement n’a pas accordé de subventions suffisantes pour les bâtiments et les installations du musée Van Gogh. Le musée utilise déjà ses propres ressources pour rendre la rénovation possible ; il couvre notamment les pertes de revenus (environ 50 millions d’euros) liées aux fermetures partielles pour les travaux, et alloue ses propres capitaux afin d’être éligible à un prêt de l’État ».
- Déficit annuel de 2,5 millions d’euros
« Une contribution annuelle de plus de 11 millions d’euros est nécessaire pour couvrir les rénovations nécessaires et les efforts obligatoires de durabilité, pour financer le projet et pour financer les futurs grands travaux d’entretien réguliers. Le ministère de l’Éducation, de la Culture et des Sciences ne versera toutefois pas plus que le niveau actuel de soutien, soit 8,5 millions d’euros, ce qui laisse au musée un déficit annuel de 2,5 millions d’euros » peut on lire dans le communiqué de presse.
« En 1962, l’État néerlandais s’est contractuellement engagé à construire et à entretenir un musée pour la collection unique Van Gogh. À l’époque, la gestion, la préservation et l’exposition de la collection étaient considérées comme plus importantes pour les Pays-Bas que les conséquences financières. Cette situation demeure inchangée aujourd’hui, compte tenu de l’immense succès du musée et de son importance pour l’ensemble des Pays-Bas. La solution est simple : le gouvernement doit allouer des ressources suffisantes aux rénovations, aux améliorations en matière de durabilité et aux économies réalisées pour les gros travaux d’entretien ».
- Avertissement ou menace de la directrice ?
« Si l’État néerlandais ne respecte pas son accord historique avec l’« ingénieur » Van Gogh et ne fournit pas les fonds suffisants pour les rénovations, l’amélioration de la durabilité et les futurs grands travaux d’entretien périodiques, le projet prévu ne pourra pas être poursuivi. Dans ce cas, le musée risque la fermeture, car il ne pourra garantir la sécurité de la collection, des visiteurs et du personnel. Car une promesse faite est une promesse tenue. Même lorsqu’il s’agit d’un gouvernement.« écrit le musée.
Une position soutenue par la Fondation Vincent van Gogh, propriétaire de la quasi-totalité de la collection d’œuvres de Van Gogh et de ses contemporains au Musée Van Gogh.
« La Fondation Vincent van Gogh est profondément préoccupée par l’accessibilité de la collection Van Gogh au vu des problèmes de financement actuels liés aux investissements nécessaires dans les bâtiments et les installations du Musée Van Gogh », indique la Fondation dans un communiqué. « L’ingénieur V.W. van Gogh, neveu de l’artiste, a conclu un accord avec l’État néerlandais en 1962 et a mis sa collection privée à la disposition du public. En contrepartie, l’État néerlandais doit remplir ses obligations légales. »
- 1ère réaction du gouvernement
Le musée a déposé une plainte contre l’État, qui devrait donner lieu à une audience judiciaire dans les prochains mois. La plainte soutient que l’État néerlandais viole l’accord de 1962.
En réponse aux questions, le ministère néerlandais de l’Éducation, de la Culture et des Sciences a rejeté la position du musée. Dans un communiqué publié juste avant la démission du ministre de la culture Eppo Bruins, du gouvernement intérimaire néerlandais, aux côtés d’autres membres de son parti centriste.
Il indique que « La subvention pour l’hébergement du Musée Van Gogh est un montant fixe, corrigé de l’inflation chaque année. Elle est calculée selon une méthodologie commune à tous les musées nationaux. » Le soutien financier public annuel atteint actuellement environ 10 millions d’euros.
Selon cette méthodologie, sans plus de précisions, le ministère a déclaré que le « Musée Van Gogh bénéficie de l’une des subventions au mètre carré les plus élevées de tous les musées nationaux ». Il a soutenu que « l’utilisation de cette méthodologie et ses conséquences pour le Musée Van Gogh ne constituent pas une violation de l’accord de 1962 ».
Le ministère a déclaré qu’il répondrait en temps voulu aux arguments avancés « dans le cadre de la procédure judiciaire engagée par le musée ».
La famille Van Gogh, qui représente la majeure partie du conseil d’administration de la fondation, a réagi en publiant une déclaration affirmant qu’elle soutenait pleinement la direction du musée et était « profondément préoccupée par l’accessibilité de la collection Van Gogh ».
2 questions se posent aujourd’hui. En cas de conflit larvé et durable, la Fondation et la Famille Van Gogh pourraient il soustraire la collection au musée d’Amsterdam ? Pourraient il même « confier » tout ou partie des chefs d’oeuvre à une autre institution muséale dans le monde ?
SOURCE : Musée Van Gogh (CP), Fondation Van Gogh, NY Times, presse
PHOTOS : Musée Van Gogh / Jelle Draper et Jan Kees Steenman
Date de première publication : 28/08/2025
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