Le lundi 13 novembre 2017, le Musée de la Reine Sofia à Madrid a lancé une bibliothèque en ligne ouverte et gratuite contenant plus de 2 000 documents sur Guernica, la célèbre peinture de Pablo Picasso. Le nouveau site interactif, appelé Rethinking Guernica, permet aux internautes d’accéder à des textes, manuscrits, lettres, documents, catalogues, affiches, enregistrements audio et vidéo et d’autres informations liées à l’une des plus célèbres et monumentales peintures de l’artiste espagnol.
L’exposition interactive ” Repenser Guernica. Histoire et conflit au XXe siècle ” est envisagée comme une exploration dans plus de 2 000 notices de 120 archives publiques et privées, bibliothèques, musées, institutions et agences nationales et internationales, dont le Musée Picasso de Paris et les Archives Nationales d’Histoire de Madrid. Ces documents, rassemblés pour la première fois sur un seul site, retracent l’histoire en la recontextualisant de la peinture Guernica.
“Guernica est une source de matériel artistique inépuisable et c’est un privilège d’être historienne de l’art” a expliqué à l’AFP Rosario Peiro, responsable des collections du musée d’art moderne Reina Sofia de Madrid. “Mettre tout cela ensemble vous permet de repenser l’histoire de la peinture”.
“Guernica”, conçu dans les profondeurs de la guerre civile dévastatrice de l’Espagne, montre le bombardement d’une ville basque le 26 avril 1937 par les forces aériennes allemandes et italiennes sous les ordres du futur dictateur espagnol Francisco Franco. Des centaines de personnes sont mortes dans une attaque aérienne contre des civils qui a choqué le monde et créé un précédent souvent répété par les forces allemandes et alliées lors de la Seconde Guerre mondiale. Picasso, vivant alors en France, a été chargé par le gouvernement républicain espagnol de produire une œuvre décrivant l’attentat à la bombe. Il réalisa cette huile sur toile de style cubiste entre le 1er mai et le 4 juin 1937, à Paris, et elle fût présentée dans le pavillon espagnol de l’Exposition universelle de Paris de 1937.
Une histoire riche et mouvementée
Le site “Repenser Guernica” et sa bibliothèque de documents racontent l’histoire de l’oeuvre, de sa création et de ses nombreux voyages, avec des arrêts en Scandinavie, en Grande-Bretagne et aux États-Unis, où elle fût prêtée des décennies au Musée d’Art Moderne de New York (MoMA).
Parmi les documents rares et étonnants, on y découvre notamment des documents relatifs à son voyage au Venezuela en 1948 qui a été interrompu par un coup d’État, et un télégramme frénétique envoyé par le directeur des collections du MoMA, Alfred H. Barr Jr, informant l’artiste que ses œuvres étaient en sécurité après un incendie du musée en 1958.
“Il est clair que c’est une peinture politique parce qu’elle a été demandée par le gouvernement dans un but de propagande” explique Rosario Peiro. “Mais pendant toutes ces années de voyage et à force d’être présentée dans des endroits différents, l’oeuvre a été dépolitisée. ‘Guernica’ est le travail le plus important, physiquement et symboliquement, pour le musée, nous devons donc continuer à travailler sur ce chef d’oeuvre. C’est le moins que nous puissions faire.”
Une prouesse artistique et technologique
Les nombreux documents d’archives sont organisés comme une constellation non hiérarchique de récits contenus dans différents documents et types de média, textes, photos et même vidéos.
. Chaque document s’est vu attribuer une série de tags – chronologiques, géographiques ou contextuels, en référence aux expositions, aux auteurs ou à d’autres aspects de la création et de la vie de cette oeuvre– qui favorisent les recherches et l’exploration.
. Une fonction Gigapixel permet également de découvrir l’oeuvre dans ses moindres détails. Les chercheurs ont pris des milliers d’images en utilisant la lumière visible et ultraviolet ainsi que la réflectographie infrarouge et les radiographies haute définition pour créer un rendu «Gigapixel» qui permet aux utilisateurs de parcourir un document composite de 436 gigaoctets. Les détails de sa restauration, les coups de pinceau individuels et même les cheveux voyous des pinceaux de Picasso peuvent être ainsi observés encore collés à la toile originale. Les résidus d’un acte de vandalisme de 1974 sont également visibles sous la forme d’une décoloration rougeâtre à peine perceptible dans les zones centrales.
. Le site présente une chronologie interactive qui retrace chronologiquement la peinture de 1936 à nos jours, montrant les documents clés associés à chaque année.
. Une autre section, intitulée “Itineraries”, permet de découvrir l’histoire et l’itinérance de l’œuvre, ses mouvements vers différentes institutions et son influence politique, à travers des documents historiques.
«Rethinking Guernica» est le résultat de deux années de recherches approfondies. Plus de 6 000 documents ont été étudiés au total pour le projet. 4 000 photographies, et autres documents provenant du musée ainsi que des vidéos seront donc ajoutées progressivement au site. Par sa richesse, le site offre donc une véritable ballade immersive dans Guernica.
Produit avec le soutien de l’opérateur de télécommunications Telefónica, fidèle mécène du musée, le site est disponible en espagnol et en anglais. Dès son ouverture, le contenu est adapté à la langue en fonction du pays de connexion.
Les membres de l’équipe interdépartementale du Museo Reina Sofía, qui a développé le projet, travaillent actuellement sur un livre documentaire, qui sera publié dans les prochains mois.
SOURCE: Musée Reina Sofia, artnet.com, idboox.com, hyperallergic.com
Date de première publication: 22/11/2017
Images: captures d’écran du site web
. Premier dispositif mobile associant wikipedia à la réalité augmenté au Musée de Mataro (Espagne)
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