A l’occasion de l’exposition Géants, le Muséum de Toulouse a décidé de réaliser en interne un documentaire sur Gastornis laurenti, une espèce d’oiseau géant dont un fossile a été découvert près de la ville rose en 2018. Ce second film de 30 min fabriqué par les équipes plonge le spectateur dans les coulisses de la reconstitution du squelette de 1m70 qui est aujourd’hui présenté aux visiteurs. Cette production met également en avant les métiers scientifiques du Muséum. Et le public est ravi : plus de 20 000 vues sur Youtube en 15 jours et des commentaires très positifs. Maud Dahlem, chargée audiovisuel et multimédia du muséum, raconte cette aventure collective et en présente les enjeux et les premiers résultats.
En 2018, une nouvelle espèce de Gastornis est découverte près de Toulouse. Cet oiseau géant d’1 m 70 a vécu il y a 52 millions d’années dans des zones forestières et marécageuses en compagnie de crocodiles, de tortues, d’échassiers et de mammifères. Plusieurs fossiles de plusieurs individus de Gastornis ont été retrouvés dans un état de conservation exceptionnel.
Suite à cette découverte majeure et afin de pouvoir la présenter au public, le Muséum de Toulouse s’est lancé le défi de réaliser un montage paléontologique, une sorte de squelette composé de fossiles et de reconstitution 3D des parties manquantes, d’après les hypothèses scientifiques actuelles.

- Un squelette exceptionnel au cœur de l’exposition Géants
L’exposition Géants du Muséum de Bruxelles accueillie au Muséum de Toulouse d’octobre 2024 à juin 2025 a été une opportunité à saisir pour présenter cette nouvelle espèce Gastornis laurenti au public.
Mais voilà , seuls les visiteurs de l’exposition ont accès au spécimen reconstitué et seulement pour un temps limité ! Alors comment lui donner vie auprès des visiteurs ainsi qu’à tous les francophones (et anglophones) du Monde ? Comment garder une trace de ce travail ambitieux mené par une pluralité de métiers ?
- Le choix du film documentaire
La chargée audiovisuel et multimédia, autrice de cet article, s’est très vite tournée vers le média vidéo. Ce format permet de montrer les fossiles et les représentations des animaux disparus, de faire parler les experts, d’entrer dans les coulisses et de donner à voir les lieux non visitables.
Un premier documentaire de 26 min avait été réalisé en 2022 intitulé « Momies, l’immortalité retrouvée ». Le film, sélectionné au festival de Narbonne, donne à voir le travail de restauration au XXe siècle sur des momies humaines, avant leur présentation dans l’exposition « Momies, corps préservés, corps éternels ». Cette première réalisation avait démontrée la capacité du Muséum à mener une production filmée en interne, de qualité et appréciée des spectateurs. (ARTICLE CLIC : [OPINION] Le muséum d’histoire naturelle de toulouse sort son premier film documentaire: retour sur une aventure collective)
Le format court de 25-30 minutes répond à une volonté d’équilibre pour amener un contenu riche tout en sollicitant l’attention du spectateur de manière raisonnable. De plus, la durée de film semi-courte est facilement exportable sur différents lieux et supports de diffusion.

- Le choix d’une réalisation interne
Pour ce second film, le choix a été de se reposer à nouveau sur les compétences internes au lieu de passer par une prestation externe.
La Direction Centre Sciences et Technique (DCSTI) de Toulouse Métropole a des équipes communes administrative et technique qui opèrent pour le Muséum et le Quai des savoirs (CSTI). Au sein de l’équipe technique, trois techniciens (lumière, son et image) travaillent aux événementiels. Pendant la période COVID et l’arrêt de tout événement, la chargée audiovisuelle a proposé à ses collègues de mettre leurs connaissances techniques à profit d’une production audiovisuelle pour répondre à la proposition du Club Innovation & Culture CLIC de produire et diffuser une visite privée du Muséum (8 700 vues) par le directeur Francis Duranthon, dans le cadre d’un tour de France des lieux culturels fermés en partenariat avec Facebook France, le Figaro et Connaissance des Arts.
De nouveau, dans le cadre de l’exposition « Magies et Sorcellerie », l’équipe technique a été sollicitée pour réaliser une série d’interviews de Boris Presseq, botaniste et responsable des collections botaniques intitulée « Les plantes magiques » (60 000 vues). C’est ainsi que petit à petit l’équipe a développé de nouvelles compétences et a réalisé au fil du temps quelques vidéos pour des diffusions en exposition et/ou en ligne.
« Le tournage en interne a permis de lever des difficultés et d’embarquer positivement les acteurs de la réalisation du spécimen Gastornis« .
Sur les réalisations internes, la chargée audiovisuelle Maud Dahlem occupe le rôle de chargée de production et de réalisatrice.
- Coulisses du tournage du film « Face à face avec Gastornis, l’oiseau géant disparu »
Le tournage du film « Face à face avec Gastornis, l’oiseau géant disparu » a demandé une certaine agilité pour s’adapter au calendrier mouvant du service Collection qui a glissé à plusieurs reprises suite à des aléas de livraison de matériaux ou à l’immobilisation du poignet du socleur (vous ne manquerez pas d’apercevoir son attelle dans une séquence du film !). Le planning est devenu de plus en plus serré avec l’ouverture de l’exposition qui approchait. Le scénario a parfois dà» être adapté pour rester cohérent malgré des scènes qui ne pouvaient plus être filmées.

Les personnes face caméra ne sont pas des acteurs et certains étaient très réticents de passer à l’image. Même les médias d’information se sont cassés les dents. Il y a donc eu en amont et pendant le tournage un travail de mise en confiance et d’échanges. Des solutions de mise en scène pour faciliter la prise de parole ont été proposées par la chargée audiovisuelle. A la fin de la production, l’équipe complète était très satisfaite de cette expérience et de pouvoir partager le travail scientifique des coulisses avec les spectateurs.
- Reproduction 3D animée du Gastornis
En 2023-24, l’équipe comprenait également un apprenti spécialisé dans la 3D. Il a été de suite très motivé à travailler sur une reproduction 3D animée du Gastornis. C’était une nouvelle expérience très instructive de travailler directement avec les experts pour arriver à un objet animé le plus juste possible au vu des connaissances actuelles.
Enzo Vergé a travaillé à partir du Gastornis 3D tout juste réalisé par la société Paléoscènes. Il a tout re-modélisé sur Blender pour obtenir des données moins lourdes et a procédé patiemment à son animation en suivant les consignes des deux paléontologues Estelle Bourdon et Yves Laurent.

La réalisation du générique de début sur After Effect a été confiée à Nicolas Papillon qui avait déjà créé le générique attractif et sensible du film documentaire précédent.
Enfin, les images appartiennent au Muséum, ce qui est un avantage de taille, elles peuvent librement rejoindre la documentation de l’objet !
- La stratégie de diffusion englobée dans une stratégie transmédia
Depuis déjà plusieurs années, le Muséum est engagé dans une stratégie transmédia qui enrichit la programmation d’une pluralité de vecteurs de sensibilisation aux sciences, couplée à une démarche d’éco-responsabilité.
Dès leurs conceptions, les médiations numériques sont pensées de manière à se répondre les unes aux autres. Elles visent des publics cibles et leurs usages. Les modes de diffusion sont anticipés pour que le média, le scénario et le traitement éditorial s’y prêtent.
Le film Gastornis a été réalisé avec l’objectif d’être exploité in-situ et en ligne durant la saison Géants (9 mois) puis sur les années suivantes (la paléontologie étant un sujet ADN d’un muséum).
Il est consultable à la médiathèque du Muséum, archivé dans la photothèque et associé aux fiches des fossiles Gastornis laurenti dans la base des collections.
Des rushs non exploités sont aussi sélectionnés pour rejoindre la photothèque tandis que les rushs restants sont supprimés par soucis écologique. Une campagne photographique, ainsi que des images 2D du film sont aussi exploitées et conservées.
Le film a été projeté en avant-première dans l’auditorium du Muséum en présence de 2 des paléontologues présents à l’image. Il continue à être présenté en boucle dans le musée à certaines dates de l’année.
Un extrait du travail en atelier a été diffusé pour illustrer les propos du métier de socleur dans le cadre d’une rencontre avec François Delarozière (Compagnie La Machine).
Le film est également amené à être diffusé dans des festivals et dans d’autres lieux culturels hors Toulouse.
Le film est hébergé et diffusé sur la chaà®ne YouTube du Muséum de Toulouse, annoncé dans la rubrique Lire, Voir, Ecouter du site web du Muséum, dans les Newsletters et sur les réseaux sociaux.
Afin d’enrichir l’expérience du Gastornis et de toucher un public plus large, deux articles Web ont été publiés.
Ils sont tous les deux rédigés notamment par Yves Laurent, découvreur de l’espèce Gastornis laurenti, paléontologue et responsable des collections de paléontologie du Muséum.
. L’un s’intéresse à la découverte et reconstitution de l’oiseau géant.
. Le second présente les nouvelles espèces de faune découvertes dans le même gisement (crocodiles, oiseaux, tortues, poissons, mammifères).
Dans l’exposition temporaire Géants, le montage paléontologique est également intégré dans le parcours QUIZ de la Visite mobile sur Smartphone.

- Les premiers retours des spectateurs
En 15 jours, les statistiques de YouTube annonçait déjà 20 000 vues dont 3 000 foyers auraient regardé la totalité des 29 min de film. Un chiffre très encourageant pour le Muséum puisqu’il dépasse largement les capacités d’un auditorium.
Le film est visionné principalement de France tout en ayant un attrait depuis le Canada, la Suisse et la Belgique.
Depuis peu, des sous-titres anglais ont été intégrés et vont permettre d’ouvrir plus largement sa diffusion.
Les retours des spectateurs sont très bons, avec un taux de satisfaction élevé. Les spectateurs rapportent qu’ils ont tout compris ! Ils ont particulièrement apprécié de plonger dans « cette aventure humaine et scientifique » et de prendre la mesure du travail en coulisse. Les personnes locales sont d’autant plus sensibles à ce sujet d’actualité que la découverte a eu lieu sur leur territoire, en Occitanie.
Quelques témoignages de spectateurs sur YouTube : « c’est super ! Je savais absolument pas que le Museum produisait du contenu youtube et en plus de ce niveau de qualité ! Merci et bravo, j’espère que l’algorithme va pousser la chaà®ne ! »; « Très intéressant, merci et bravo pour votre travail, vos recherches. »; « Une super aventure scientifique, humaine. Merci de ce beau travail qui nous fait remonter le temps sur des millions d’années. Superbe« ; « Woaw! Super, merci la gang, on avait l’impression de faire partie de l’aventure. Super docu. »; « Superbe documentaire, qui permet de voir les différentes faces de la paléontologie: ses métiers, y compris pour la restituer au grand public. Merci énormément au muséum de Toulouse, à ses chercheurs et techniciens, et à ses réalisateurs. »; « Super vidéo je me suis régalé, très interessant » et « Magnifique documentaire. Très instructif. ».
Des enseignants témoignent avoir proposé le visionnage à leurs élèves de terminale dans le cadre du chapitre sur l’évolution : « Le film est un combo intéressant, il parle d’actualité, mêle des connaissances et présente des métiers peu connus. Le spécimen en exposition ne se regarde plus de la même façon après avoir vu le film ! ».
museum.toulouse-metropole.fr/film-face-a-face-avec-gastornis-loiseau-geant-disparu/
museum.toulouse-metropole.fr/geants/
museum.toulouse-metropole.fr/decouverte-et-reconstitution-de-loiseau-geant-disparu/
Article rédigé par Maud Dahlem, chargée audiovisuel et multimédia du Muséum de Toulouse
SOURCE: Muséum de Toulouse
PHOTO du carrousel: discussion des visiteurs devant le spécimen Gastornis laurenti présenté dans l’exposition « Géants » à Toulouse. CC-BY-NC-SA Tristan Delaunay, Muséum de Toulouse.
Date de première publication: 14/02/2025
Le Muséum de Toulouse est membre du CLIC
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.