La pierre de Rosette “restituée virtuellement” à l’Egypte, grâce à la réalité augmentée

Partager :
Temps de lecture : 5 min

La pierre de Rosette, un des objets les plus précieux conservé au British Museum, est sur le point d’être “restituée numériquement” en Égypte grâce à une expérience de réalité augmentée. Grâce à la technologie de réalité augmentée, les visiteurs de Fort Qaitbay à Rashid, en Égypte, pourront voir une réplique en trois dimensions de la pierre de Rosette en pointant leur smartphone vers un code QR. Looty, un collectif d’artistes et designers basé à Londres, vise ainsi à “récupérer” des objets volés dans les musées occidentaux à l’époque coloniale. 

À Fort Qaitbay à Rashid, le long de la côte nord de l’Égypte, les visiteurs pourront bientôt se tenir là où la pierre de Rosette aurait été trouvée, pointer leur smartphone vers un code QR et regarder la pierre sortir de leur écran en réalité augmentée. 

L’expérience présentera une image haute définition de la pierre de Rosette, accompagnée de descriptions détaillées en arabe et en anglais. Les visiteurs découvriront également une traduction des inscriptions de la pierre et un récit de la façon dont l’objet a quitté l’Égypte.

La pierre de Rosette dans la salle 4 du British Museum. Photo: British Museum

La pierre de Rosette, datant d’il y a 2 200 ans, a joué un rôle central dans le déchiffrement des hiéroglyphes et la naissance de l’égyptologie. Initialement découverte par les forces françaises lors de l’invasion de l’Égypte par Napoléon en 1799, elle est ensuite tombée en possession britannique dans le cadre d’un ensemble d’objets transférés après la défaite de la France. Connue à l’origine sous le nom de Hajar Rashid, elle constitue l’un des chefs d’œuvres des collections du British Museum depuis 1802.

Le fondateur de Looty durant la session de numérisation au British Museum
  • Hold-up numérique

Avec la professeure et archéologue de renom Monica Hana, l’équipe de Looty a exécuté “un braquage numérique” au British Museum, en utilisant la technologie LiDAR et en réalisant des scans détaillés de la pierre de Rosette. Ces scans ont ensuite été transportés, à la fois physiquement et numériquement, vers Rashid à l’aide de la RA géolocalisée.

Le fondateur de Looty et l’archéologue Monica Hana à Rashid

“Cette utilisation innovante de la technologie a permis à l’une des premières œuvres d’art rapatriées numériquement au monde d’être replacée dans son domaine physique d’origine” se félicite Looty.

L’initiative de Looty s’aligne sur la campagne “Rapatriate Rashid”, qui exhorte le Premier ministre égyptien à exiger le retour de la pierre de Rosette.

Alors que le British Museum soutient que la pierre leur a été offerte diplomatiquement, Looty et les militants soutiennent qu’elle “a été pillée et devrait être légitimement restituée”.

Le projet Pierre de Rosette a fait l’objet d’un article du New York Times du 11 août 2023 et a donné lieu à un documentaire disponible sur Youtube.

La Pierre de Rosette a fait l’objet d’une numérisation disponible en haute définition sur le site web du British Museum et sur la plateforme Sketchfab.

De nombreuses demandes de restitution du gouvernement égyptien, qui ont été faites au British Museum, au Louvre et au Neues Museum, entre autres, sont restées sans réponse.

En juin 2023, deux blocs de pierre dorée, couverts de hiéroglyphes, ont été restitués à l’Égypte. Provenant de la tombe du prêtre Haou, découverte en 2000 sur le site de Tabbet el-Guech par l’archéologue Vassil Drobev, et sortis illégalement du pays entre 2001 et 2002, ces objets étaient proposées par le marchand Didier Wormser, à Paris, dans la salle des ventes Pierre Bergé et Associés.

  • Activisme technologique

Le projet autour de la Pierre de Rosette démontre l’engagement persistant de Looty à préserver le patrimoine culturel et à partager les histoires vraies des communautés africaines locales.

Créé par l’artiste nigérian Chidi Nwaubani, le collectif Looty fait partie d’un mouvement croissant d’activistes, d’artistes et d’universitaires d’ascendance africaine qui utilisent les médias numériques pour récupérer leur patrimoine.

Ces efforts comprennent la présentation de répliques dans des expositions internationales et le retour d’objets dans leur pays d’origine. Cette approche remet également en question la lenteur de la restitution par les musées traditionnels.

Le collectif Looty a été lancé en mai 2022 avec la numérisation de plusieurs bronzes du Bénin qui ont été pillés par les troupes britanniques en 1897 dans l’actuel Nigeria et qui sont maintenant conservés au British Museum de Londres. (ARTICLE CLIC: Le projet “Looty” vise à rapatrier de manière numérique les objets d’art africains des collections muséales mondiales)

En utilisant des technologies avancées telles que LiDAR et XR/AR, Looty vise à “simplifier le processus d’accès et d’étude d’objets culturels inestimables, permettant aux générations futures de se connecter avec leur patrimoine légitime”.

Le collectif Looty cherche à donner aux habitants des anciennes colonies l’accès à des répliques et à la connaissance de leurs trésors culturels. Leur objectif est également de défier les musées occidentaux sur la narration et de fournir une représentation plus inclusive de l’histoire et de l’art.

En reproduisant virtuellement des artefacts pillés, Looty espère déplacer l’attention vers l’espace numérique, “Personne ne colonise l’espace numérique. C’est comme un espace libre” se réjouit le fondateur de Looty.

  • Le projet Milele

En 2023, Looty s’est associé au Milele Museum, soutenu par le Goethe-Institut, pour lancer un projet révolutionnaire. En collaboration avec des représentants du Nigéria, du Kenya et du Rwanda, l’objectif est de créer le premier musée virtuel Africain. L’expérience de réalité virtuelle et de jeu à l’aide d’Unreal Engine, est centrée sur la préservation du patrimoine culturel africain.

‍Looty et Milele Museum développent ensemble un jeu de type chasse au trésor, qui vise à immerger les utilisateurs dans des lieux et des objets du patrimoine culturel à travers le Nigeria, le Kenya et le Rwanda. Le format métavers permettra un accès facile via des applications Web et mobiles.

‍La collaboration donnera naissance à “un voyage enchanteur et éducatif, permettant aux utilisateurs de se connecter avec leurs racines africaines à travers un espace fictif mais culturellement riche”.

“Le musée Milele est devenu un symbole de fierté, célébrant à la fois les artefacts historiques et l’art africain contemporain, indépendamment de la validation occidentale” explique Looty.

www.instagram.com/milelemuseum/  www.facebook.com/milelemuseum

https://www.looty.art/works/rashid

https://www.looty.art/works/milele

SOURCES: Looty, presse

PHOTOS: Looty

Date de première publication: 15/08/2023

banner clic avril 2024

Laisser un commentaire