Patricia Buffa et Candice Chenu (Fondation Louis Vuitton): “On ne s’interdit jamais d’imaginer. Rêve et voyage sont sources de créativité et inversement”

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Temps de lecture : 10 min

A l’occasion de la mise en ligne progressive de sa collection et du lancement d’une nouvelle application mobile musicale, le CLIC France interroge la Fondation Louis Vuitton sur ses développements et sa stratégie numérique. Patricia Buffa, Responsable de la communication digitale et Candice Chenu, Responsable des projets numériques de médiation et de la privatisation à la Direction des publics répondent à nos questions.

Clic-separateur EVENEMENT CLIC

Mercredi 24 mai 2017, de 10.00 à 12.00, une visite CLIC France de la Fondation Louis Vuitton permettra de tester in-situ les nouveaux outils numériques présentés dans l’interview ci-dessous. 

Visite réservée aux membres du CLIC. inscription obligatoire: ateliers@club-innovation-culture.fr

. La Fondation a été créé en 2006. Pourquoi avez-vous attendu plus de 10 ans avant de partager la collection sur internet ?

Patricia Buffa: La Fondation a ouvert au public en octobre 2014. Depuis cette ouverture, elle a présenté une sélection d’œuvres de sa collection avec quatre expositions « L’accrochage inaugural », « Lignes Expressionnistes et contemplatives », « Pop et Musique » et « Des artistes chinois à la Fondation Louis Vuitton ». Bientôt nous allons enrichir le module « La Collection » du site web en présentant les œuvres africaines de la Collection.

La vocation de ce module est de restituer sur le web l’expérience que le visiteur a eu ou pourrait avoir dans les galeries de la Fondation. Les œuvres de collection sont d’abord présentées au public (à la Fondation, ou bien à travers des expositions hors-les-murs, dans les Espaces Culturels Louis Vuitton, ou encore des prêts à des musées) et ensuite online. En ce moment, dans le module Web Collection vous pouvez explorer les œuvres qui ont été exposées à la Fondation, que nous allons ensuite enrichir en incluant les présentations de la Collection hors les murs.

Notre intention n’a pas été celle de mettre à disposition une base de données, mais de raconter et documenter les différentes présentations de la Collection qui ont eu lieu jusqu’à présent.

collection fdlv 1

. Quelles ont été vos motivations pour créer ce nouveau module « collection » ? 

PB: Notre exigence est de présenter la pensée scientifique construite autour de la collection, qui tout comme l’architecture iconique de Frank Gerhy, représente un des piliers constituants l’identité de la Fondation.

. Quel public visez-vous en priorité ?

En privilégiant les éléments visuels (le carrousel d’images qui permet de voir l’œuvre de tous les côtés, les vidéos des expositions etc.) on vise à communiquer avec le grand public qui est intéressé par l’art contemporain. En glissant vers le bas de chaque page on trouve des contenus de plus en plus approfondis, comme des informations sur l’itinérance de l’œuvre, ou une sélection bibliographique. Ce sont des contenus destinés à un public plus spécialisé.

. Pourquoi avez-vous choisi de partager la collection de la fondation par le prisme des expositions ?

PB: C’est un parti pris. La Collection de la Fondation n’est pas un ensemble figé et elle n’est pas non plus exposée de manière permanente. Elle se développe autour des lignes sensibles définies par la Direction Artistique de la Fondation (Contemplative, Popiste, Expressionniste, Son/Musique) et elle se dévoile au rythme des expositions.

Suivre ce rythme et documenter les expositions de la manière la plus fidèle possible nous a semblé le choix plus cohérent et en ligne avec l’esprit de la Fondation.

collection fdlv

. Ce module s’enrichira donc au fil des expositions. Combien d’œuvres et d’artistes supplémentaires seront-ils par exemple ajoutés à l’occasion de l’exposition Afrique ?

PB: 15 artistes et 19 œuvres pour un total de 94 nouveaux objets qui seront saisis dans le module « La Collection ».

. Le module permet d’explorer la collection par trois entrées : les expos, les œuvres et les artistes. Pourquoi ne pas avoir choisi une approche également chronologique ?

PB: C’est une bonne remarque. C’est une des propositions faites pour la prochaine version.

. 71 artistes font déjà l’objet d’une page biographique et certains d’une interview vidéo. Allez-vous systématiser cette dernière pour les nouveaux artistes vivants que vous allez ajouter ?

PB: Oui, c’est notre intention.

. Le module ne comporte aujourd’hui « que » 150 œuvres. Pourriez-vous imaginer de l’enrichir en dehors des expositions à la Fondation ? à l’occasion des expos hors les murs ? 

PB: Oui, les expositions hors les murs seront intégrées dans la deuxième version de ce module.

. Avez-vous rencontré des restrictions de mise en ligne dues aux problématiques de droits d’auteur ?

PB: Non.

. Une grande partie des œuvres présentées dans le module collection sont resituées dans le contexte de l’exposition. Pourquoi ne pas proposer également une visite virtuelle (en 360° par exemple) des expositions passées et des différentes salles ?

PB: On avait proposé une visite virtuelle sur le site web de la Fondation à l’époque de l’accrochage « Pop et Musique » et lors de l’exposition « Icônes de l’art moderne, la collection Chtchukine » nous avons a publié sur notre compte Facebook des photos et des vidéos 360° d’une sélection des salles d’expositions. On continue à tester cette technologie, mais nous avons décidé de ne pas l’intégrer dans la première version de ce module.

. Le nouveau module collection sera-t-il relayé sur les réseaux sociaux de la fondation par la publication des images des œuvres afin de développer la notoriété et l’usage de ce module ?

PB: Bien sûr !

. Vous complétez déjà ce module collection par des ressources bibliographiques et des liens vers wikipédia. Envisagez-vous d’autres enrichissements éditoriaux (comme par exemple des contenus pédagogiques ou plus scientifiques) ?

PB: Le principe de navigation reste celui de pouvoir accéder à des contenus de plus en plus approfondis en descendant vers le bas des pages « Œuvres » et « Artistes ».  Après avoir eu un premier retour de la part des utilisateurs, on pourra prendre des décisions sur le type de contenus supplémentaires à proposer autours de nos expositions.

. Envisagez-vous d’ajouter une fonction « compte personnel » qui permettrait de mettre en favoris des œuvres de la collection et de créer « sa »collection personnelle ?

PB: C’est une des proposions avancées pour les évolutions de ce module.

La Fondation Louis Vuitton a publié sa nouvelle application mobile Lucky Vibes le mars 2017. (lire l’article du CLIC France)

. Cette application très ludique et décalée est-elle avant tout destinée à toucher le public plus jeune ou éloigné ?

Candice Chenu: Oui. L’enjeu est aussi de fédérer une communauté et d’avoir un autre rapport au public.

. L’application propose un jeu à dominante musicale, pourquoi ce choix ?

CC: Cette dominante nous semblait plus adaptée au public destinataire.

. N’est elle pas un peu loin des œuvres, des expositions ou de la collection ?

CC: Oui, elle est décalée. Elle fait toutefois découvrir l’architecture, une des principales sources de visite de la Fondation Louis Vuitton. L’avatar survole le bâtiment, tel un drone, et permet de le découvrir vue du dessus, sous différents angles.

appli fdlv

. Comment est né ce projet ? comment avez-vous choisi le développeur ?

CC: C’est le second jeu que la Fondation Louis Vuitton développe avec le studio anglais Amphio/Touchpress suite au succès du premier : Archi Moi. L’application ludique iPad Archi-moi a en effet remporté plusieurs prix dont le Prix du meilleur projet digital décerné par Museums and the Web en 2015 dans la catégorie Education

. Pouvons-nous imaginer, si l’application se développe, que le joueur ait la possibilité d’entrer à l’intérieur de la fondation pour découvrir et interagir avec les œuvres, comme une sorte de visite ludique et amusante ?

CC: Pourquoi pas ? On ne s’interdit jamais d’imaginer. Rêve et voyage sont sources de créativité et inversement.

. L’application est d’abord lancée seulement sur iOs. N’est-ce pas un handicap ? Quand allez-vous la lancer sur Android ?

CC: L’application arrivera sur le GooglePlay en septembre 2017 dans le cadre d’une version bénéficiant de retours de visiteurs. L’itération et la prise de recul nous semblent être utiles pour ce type de projet.

. L’application inclut une dimension compétition qui démarre le 5 avril 2017. Cette approche sera reconduite et systématique ? Après le 7 avril, les joueurs pourront gagner d’autres invitations ?

CC: Les joueurs du 5 avril ont pu gagner des invitations pour la Nocturne du 7 avril et les joueurs du 7 avril ont pu gagner des invitations coupe-file pour la future exposition ART/AFRIQUE, LE NOUVEL ATELIER.

Avant l’été, des joueurs pourront de nouveau tenter de gagner des invitations. Cette approche aura lieu au moins une fois par trimestre.

. Qui a composappli fdlv 1é la musique ? 

CC: Guillaume Van Roberge. Il s’agit d’un artiste Franco-Québécois. Designer sonore et DJ, il est également Chorégraphe et Romancier.

. L’artiste a-t-il été inspiré par le lieu et la collection ?

Il s’est inspiré du lieu, du bâtiment, de son environnement, des saisons et de l’atmosphère du jeu.

Le jeu comporte 4 niveaux :

  • Sous le soleil exactement (été)
  • Dans le vent (hiver)
  • Happy Hour (nuit)
  • Sous les projecteurs

Une musique spécifique a été créée pour chaque niveau.

. Depuis un an, la Fondation LV est associée à une école de design, dont les étudiants ont notamment créé une partie des dessins de l’application. 

CC: Nous avons initié en 2016/2017 un partenariat avec le DSAA (Diplôme Supérieur des Arts Appliqués) Design et Narration Multimédia du  Lycée Jacques Prévert de Boulogne. L’enjeu était de réfléchir ensemble, concevoir, prototyper et tester de nouvelles pistes pour nos outils de médiation culturelle. Nous envisageons de renouveler ce partenariat car la coopération a été particulièrement fructueuse. Nous explorerons sans doute d’autres pistes la saison prochaine, peut-être davantage en lien avec la réalité augmentée et les vidéos 360°.

. Une partie de ces nouveaux outils de médiation ainsi que l’application ont été présentés le 24 mars lors d’un premier FLV Lab qui permettait également aux visiteurs de devenir testeurs. Combien avez-vous eu de visiteurs testeurs pour cette première édition ? 

CC: Nous avons accueilli quelques centaines de visiteurs pour cette première édition. Cette journée a été l’occasion d’engager le dialogue avec les publics autour des dernières initiatives numériques et digitales de la Fondation.

. Combien de prototypes étaient testables ?

Ils pouvaient tester :

  • Le jeu musical sur smartphone « Lucky Vibes »,
  • La web collection,
  • L’évolution de l’application d’aide à la visite « Fondation Louis Vuitton », avec l’intégration de la technologie IBeacon, pour que chaque visiteur puisse découvrir son « œuvre mystère »,
  • Les sept prototypes issus du partenariat avec les étudiants du master DSAA (Diplôme Supérieur d’Arts Appliqués) Design Graphique et Narration Multimédia du Lycée Jacques Prévert à Boulogne, des outils numériques de médiations imaginés pour la Fondation Louis Vuitton.

fav lab fdlv

. Quelles ont été les réactions, les retours des participants ?

CC: Les participants étaient très enthousiastes. Cela nous a donné envie de renouveler l’opération.

. Est-ce une démarche que vous allez pérenniser ? Combien de FLV Lab envisagez-vous d’organiser chaque année ?

CC: Cela se fera en fonction de l’avancée de nos pistes et propositions. Il faut que cela fasse sens. Le rythme serait a priori de 1 ou 2 par an.

. Le FLV Lab est il réservé aux étudiants de l’école partenaire ou pourrez-vous l’ouvrir à d’autres développeurs ? 

CC: Cette première édition n’était pas réservée qu’aux étudiants. Nos prestataires partenaires étaient également partie prenante. Cela était très important pour nous. Leur implication nous semblait nécessaire et nous avons souhaité les associer étroitement au projet. C’était notamment l’occasion pour eux d’avoir un retour des visiteurs et d’expérimenter des pistes.

Nous avons pu tester avec eux 3 autres projets :

  • Le jeu musical sur smartphone « Lucky Vibes »,
  • La web collection,
  • L’évolution de l’application d’aide à la visite « Fondation Louis Vuitton », avec l’intégration de la technologie IBeacon, pour que chaque visiteur puisse découvrir son « œuvre mystère ».

Pour ce dernier projet un prototype a été réalisé et testé par notre partenaire « développeur » Applidium en coopération avec notre partenaire « conseil » Réciproque grâce à des maquettes audio enregistrées gracieusement pour ce test par notre partenaire Audiovisit en charge de la production de contenus de l’App.

. Un autre outil numérique sera prochainement proposé aux visiteurs, qui s’appuie sur la géolocalisation indoor avec iBeacon. Pouvez-vous présenter cet outil ? Sera-t-il intégré dans l’application mobile de la Fondation ?

CC: Il s’agit d’un nouveau module de l’App Fondation Louis Vuitton. A chaque nouveau parcours de visite, nous pourrons intégrer ce nouveau module si nous le souhaitons et si cela nous semble pertinent. Ce module permettra au visiteur de découvrir des œuvres mystères en lien avec le parcours concerné en fonction de son choix de mots clés et de sa déambulation dans l’espace.

Travaillez-vous sur d’autres outils numériques de médiation ? ou de communication ?

CC: Oui. On ne s’interdit pas notamment de réfléchir à des outils intégrant réalité augmentée ou réalité virtuelle.

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Crédits : © Fondation Louis Vuitton, Farida Bréchemier

. Le lancement de l’application Lucky Vibes est associé au lancement d’une nouvelle offre culturelle, les nocturnes. En quoi consistera cet évènement ?

CC: La Nocturne est un rendez-vous mensuel pour voir la Fondation autrement. Ce rendez-vous est thématisé autour de l’actualité de la Fondation.

. Le premier se déroule en déhors d’une expo, le public pourra-t-il quand même découvrir des œuvres de la collection ?

CC: Il fut l’occasion de découvrir les œuvres permanentes et l’architecture du bâtiment (parcours architectural dans le noir pour faire écho au niveau nuit du jeu, galerie 8 sous la neige pour faire écho au niveau hiver du jeu, etc.).

. Combien pouvez-vous / espérez-vous accueillir de visiteurs nocturnes ?

CC: Nous avions considéré que cette première édition serait un succès  avec 500 personnes et nous avons accueilli au final 1 000 personnes.

. Sera-t-il régulier ? 

CC: Oui. Tous les premiers vendredis de chaque mois. Avec une ouverture jusqu’à 23h.

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Crédits : © Fondation Louis Vuitton, Farida Bréchemier

. Cet évènement combinera-t-il à chaque fois musique et numérique ?

CC: Surtout musique mais pas de formatage. La programmation des Nocturnes se fera en fonction de l’actualité. La personne en charge de l’organisation des nocturnes est également responsable de la médiation culturelle.

. Y associerez-vous également des écoles / des étudiants (écoles d’art, écoles numériques etc) ?

CC: Pas de règle. Pas de formatage. Sur mesure en fonction de l’actualité du moment et de la pertinence des possibilités offertes. L’idée est de se renouveler en permanence.

Propos recueillis par mail le 14/04/2017

Photos: Fondation Louis Vuitton, Farida Bréchemier

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