La Fondation pour la culture et les civilisations du vin qui gère la Cité du Vin de Bordeaux apporte son expertise à un projet chinois pharaonique : le musée universel du vin. L’ouverture est prévue à la fin 2021, pour un investissement annoncé de 60 millions d’euros.
Un centre culturel dédié au vin va voir le jour à Fangshan, à 40 kms de Pékin, un peu plus de cinq ans après l’inauguration de la Cité du vin de Bordeaux. Les deux institutions travaillent en coopération mais il ne s’agit ni d’une copie, ni d’une licence de marque.
“Avant de nous lancer dans cette aventure, nous avions reçu une quinzaine de délégations chinoises qui souhaitaient reproduire ce que nous avons monté sur les rives de la Garonne”, explique Philippe Massol, directeur général de la Fondation pour la culture et les civilisations du vin à Bordeaux. “Mais cette fois, nous avons été séduits par la vision culturelle et la volonté de développer la connaissance des Chinois en matière de vin. Sur le fond comme sur la forme, nous ne dirons pas les mêmes choses à Pékin qu’à Bordeaux car les attentes et le niveau de connaissance des visiteurs seront différents ”.
Le projet n’est donc pas d’ériger un fac-similé de la cité du Vin mais d’apporter son expertise à un projet chinois “dans le cadre d’un partage de compétences et d’idées”.
Plusieurs projets en Chine ont été envisagés par la Cité du Vin dont un musée du vin à Dalian, qui n’a pas vu le jour.
Un projet porté par un chinois francophile et amoureux du vin
Trois raisons majeures ont penché en faveur du projet de Fangshan, porté par Weixing Tang, homme d’affaires à l’origine du projet.
Son initiateur parle français depuis l’age de 12 ans et connaît bien la culture hexagonale et son vin, il a planté un vignoble de 60 ha en 1999, 70 hectares au sud-ouest de Pékin, et vinifie en bio son château Bolongbao (“Bo” pour Bordeaux, “long” pour la durée et “bao” qui signifie château), dans le style bordelais, et enfin, la Mairie de Pékin participe à ce projet de musée. Cerise sur le gâteau: Weixing Tang a obtenu que Eastern Airlines et Air China vendent des cuvées françaises dans leurs avions.
Sylvie Cazes, présidente de la Fondation, explique que “Les investisseurs qui visitent la cité du vin veulent construire exactement la même. Ce n’était pas la demande de Weixing Tang, qui souhaitait d’abord réfléchir et dialoguer ensemble, pour bâtir un lieu où l’on pourrait apprendre aux Chinois à découvrir le vin.”
Ce partenariat d’ingénierie culturelle doit soutenir un “nouvel axe de développement pour les équipes de la Fondation”.
Un investissement de 60 millions d’euros
Dans les faits, c’est un district de la ville de Pékin et le gouvernement chinois qui ont pris les commandes du projet de Musée universel de Pékin, en le finançant à 100 %.
L’investissement de 60 millions d’euros, chiffre officiel pour le seul bâtiment central traduit une volonté politique : faire la promotion du vin au détriment du baijiu, l’eau-de-vie traditionnelle chinoise, à base de céréales, aussi populaire que ravageuse pour la santé. Aujourd’hui, 600 millions d’hectolitres de cet alcool local sont consommés chaque année, contre 10 millions d’hectolitres de vin.
Weixing Tang précise son projet : “Expliquer aux Chinois ce qu’est le vin et la civilisation du vin, dans un lieu avec des caves, des expos, où l’on est sûr que le vin est bien servi, afin de passer un moment à la française. Je veux participer à l’éducation viticole des Chinois, en m’appuyant sur les compétences de la Cité du vin bordelaise”.
Le nouvel espace de 18 000 m², installé à côté du domaine Bolongbao, comprendra un parcours permanent de 6 700 m² avec des expositions temporaires, un auditorium, des animations multi-sensorielles, une cave, un restaurant gastronomique et une école du vin.
La zone commerciale voisine avec des hôtels inclura évidemment des espaces de ventes de vin aux particuliers. Il y aura aussi une pépinière d’entreprises chinoises et internationales. Le projet se veut aussi « éco-responsable » grâce à l’énergie de l’hydrogène.
Le projet est ambitieux avec l’objectif d’accueillir 500 000 visiteurs la première année, un public équivalent à celui de la Cité du vin à Bordeaux.
Conçu en partenariat avec l’agence française Architecture Studio, basée à Paris, Shanghai et Venise, le projet se présente comme “ un village de pierre adossé aux vignes”, inspiré de Saint-Émilion. L’agence Scarabée, qui avait déjà porté il y a 10 ans sur les fonts baptismaux ce qui allait devenir la Cité du vin, est également associé au projet chinois.
Un contenu adapté au public chinois
Le contenu du musée de pékin a été entièrement repensé pour la culture chinoise, avec la Chine en tant que fil conducteur.
Les 5 thèmes seront les suivants:
. qu’est ce que le vin
. le vin dans le monde avec 12 grands pays, 6 du nouveau Monde, 6 de l’ancien, dont la France et la Chine
. l’histoire du vin en Chine, riche de ses dernières découvertes archéologiques
. le vin et les sens présentera les catégories de vin (rouge, rosé, blanc, effervescent…) et leur effet sensoriels, avec chaque fois que possible, un passage à la pratique et des conseils sur l’art de vivre.
L’étape incontournable de la dégustation sera mise en scène comme dans un bistrot parisien.
“Cette Cité du vin est aussi une façon de lutter contre la contrefaçon en faisant œuvre pédagogique et en expliquant aux consommateurs ce qu’est vraiment le vin et ce que sont les vraies étiquettes. Dans le cadre de cette mission, nous travaillons d’ailleurs avec les services des douanes”, explique Weixing Tang.
D’autres coopérations entre Bordeaux et Pékin
La première pierre du centre culturel dédié au vin doit être posée à Fangshan en avril 2020, pour une ouverture du lieu à la fin 2021.
Des expositions itinérantes sont déjà prévues entre les deux villes.
En 2019, la Cité a accueilli 416 000 visiteurs soit 1,5 million depuis l’ouverture, dont 46 % d’étrangers, un pourcentage en hausse de 20 %.
Le taux de satisfaction est de 90 %, mais Philippe Massol envisage de “faire évoluer le contenu de la Cité du vin à Bordeaux, parfois trop dense ou trop spécialisé, en fonction de cette réflexion conduite entre ses équipes et celles de Weixing Tang”.
4ème projet muséal français en Chine
Le projet de coopération de la Cité du Vin de Bordeaux est le 4ème projet muséal français en Chine.
Il est annoncé après :
. l’ouverture de l’annexe du Centre Pompidou à Shanghai en novembre 2019, dans le cadre d’un contrat de licence de marque, de vente d’expertise, de prêt d’oeuvres et d’organisation d’expositions
. l’association du Musée Picasso Paris et de la Fondation Giacometti à l’ouverture d’un nouveau centre d’art à Pékin, en juin 2020, dans le district 798, dans le cadre d’un contrat de vente d’expertise, de prêt d’oeuvres et d’organisation d’expositions
. le projet de création d’un musée Rodin à Shenzhen, fruit d’un partenariat entre le musée Rodin Paris, la ville de Shenzhen et un collectionneur chinois, dans le cadre d’un contrat de vente d’expertise, de prêt et achats d’oeuvres et d’organisation d’expositions.
Un 5ème projet devrait être annoncé prochainement par une autre institution muséale scientifique française.
SOURCES: avis-vin.lefigaro.fr, lejournaldesentreprises.com, vitisphere.com, winespectator.com
PHOTOS: Architecture Studio,
Date de première publication: 06/02/2020
La Cité du Vin est membre du CLIC France
. Deux ans après son ouverture, la Cité du vin de Bordeaux a accueilli son millionième visiteur
. Le musée Rodin de Paris en discussion avancée pour ouvrir un centre d’art en Chine
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